Carrefour va vendre des fruits et légumes « interdits » afin de s'engager en faveur des semences paysannes aujourd'hui proscrites par la loi

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La courge butternut Kouign Amann, le haricot coco du Trégor, le potimarron Angélique… De jolis noms originaux pour des fruits et légumes pas communs. Vous ne les connaissez peut-être pas, et c’est normal : ces produits ne sont pas autorisés à la vente directe. Mais en vue de lutter contre cet état de fait, Carrefour s’engage à ramener plus de diversité dans nos assiettes en les commercialisant au sein de son « marché interdit » !

« Interdit », vous avez bien lu. En réalité, si Carrefour n'enfreint bien évidemment aucune loi, d'autres commerçants, et en particulier les petits producteurs, seraient bien en peine de faire de même légalement. Issus de semences de variétés paysannes, ces produits doivent, pour être vendus dans le cadre d’un circuit court, être homologués dans le catalogue national qui répertorie les espèces autorisées à la vente et à la culture, selon le décret n° 81-605 du 18 mai 1981.

Seulement, pour parvenir à être répertoriés, les paysans doivent répondre à des normes bien strictes (forme, couleur, taille…) et surtout, débourser entre 1 000 et 10 000 euros. Des restrictions et des coûts colossaux, qui dissuadent malheureusement les petits agriculteurs d'entreprendre de telles démarches. À la rigueur, les paysans peuvent encore vendre leur production aux grandes surfaces, qui elles seules sont capables d’y mettre le prix.

Carrefour

Fort de ce constat, Carrefour a pris les devants. En effet depuis hier, mercredi 20 septembre, l’enseigne lance la commercialisation d’une dizaine de produits issus de l’agriculture paysanne, en utilisant sa puissance pour payer ces frais inaccessibles aux plus petits distributeurs.

Parlant de « combat » pour la biodiversité, Carrefour s’engage pleinement en lançant une pétition pour assouplir la loi, et permettre aux petites structures traditionnelles de commercialiser elles aussi ces produits. De plus, la marque promet de prendre en charge le développement d'un réseau de production des semences paysannes pour faciliter l’accès et la production de celles-ci.

Jouant sur le côté interdit, illégal, s’apparentant presque à un dealer de fruits et légumes, la marque s’amuse à créer le trouble. Voici un aperçu de sa campagne avec cette publicité aux allures de court-métrage :

Malgré le coup de pub évident pour la marque, Carrefour soulève tout de même tout un problème auquel se heurtent la plupart des agriculteurs. Des 7 000 espèces issues de semences paysannes, seules 150 sont actuellement certifiées. En tout, cela ne représente de 80 000 variétés, sur les 2 100 000 existantes.

Pixabay

Vu que 75 % des variétés comestibles ont disparu en moins d’un siècle, il est sûrement temps à présent de reprendre les choses à bras-le-corps et de faire bouger les choses pour faciliter la biodiversité et protéger le patrimoine agricole et alimentaire.


Au sujet de l'auteur : Clémentine L.

Journaliste