Cette ville fait six fois la taille de New York et pourtant personne n'y habite... Découvrez les mystères de Naypyidaw, la capitale de la Birmanie !

Bouton whatsapp

Fruit de la prise de pouvoir de la junte militaire, Naypyidaw est devenue la capitale officielle de la Birmanie en 2005. Le paradoxe, c’est qu’elle ne compte aucun habitant malgré son énorme superficie.


Qu’avaient réellement les dirigeants de la junte militaire dans la tête en bâtissant cette immense cité ? Située à 320 kilomètres au nord de Rangoon, l’ancienne capitale, Naypyidaw a récupéré ce prestigieux statut le 7 novembre 2005.

Nic Dunlop/Panos Pictures


Un document révélé par Wikileaks en 2006 faisait ressortir l’avis des diplomates américains, qui misaient sur une crise mégalo de Than Shwe, chef de la junte à l’époque. Également, d’autres se sont interrogés sur la volonté militaire de déplacer la population de Rangoon afin d’anticiper et éteindre tout mouvement potentiel de contestation. Aujourd’hui, on n’en sait rien de concret puisque la junte ne s’est jamais expliquée…


Signifiant « ville royale » ou la « demeure du Roi », Naypyidaw était destinée à accueillir près d’un million d’habitants alors que sa construction aurait coûté près de 4 milliards de dollars (soit 3,69 milliards d’euros). Seulement voilà, comme le montrent les images rapportées par deux journalistes britanniques, la ville est totalement dépourvue de résidents… enfin presque !

Ye Aung Thu / AFP


Pourtant, ce n’est pas l’espace qui manque ! Naypyidaw s’étend sur 4 800 km², soit six fois la taille de New York. On y trouve des centres commerciaux très imposants, un safari, des terrains de golfs, un zoo, un stade géant et des autoroutes pouvant accueillir 20 files de véhicules où il n’y a aucune circulation…

Nic Dunlop/Panos Pictures


« Rien ne bouge. Officiellement, la population de la ville est d’un million d’habitants, mais nombreux sont ceux qui doutent de ce chiffre » déclarent Matt Kennard et Claire Provost, les deux journalistes anglais invités à venir visiter la ville l’an dernier.

France Diplomatie/Flickr


De leurs yeux, ils n’ont vu qu’une grande cité urbaine désertique : « Cela ressemble à une image terrifiante d’une banlieue américaine après l’apocalypse, comme un film de David Lynch filmé en Corée du Nord. »

Nic Dunlop/Panos Pictures


La comparaison avec l’état dictatorial coréen n’est pas anodine. En effet, cette capitale a été bâtie dans le plus grand secret. Les institutions et le pouvoir étaient censés y déménager mais l’absence de mouvement et de circulation a interpellé la communauté internationale sur les vraies raisons de l’existence de cette ville.


Par ailleurs, des rapports avancent la thèse de l’existence d’un immense réseau de tunnels conceptualisés par des architectes nord-coréens. Toutes les théories farfelues, notamment l’existence d’une usine nucléaire, ont circulé sur cette fameuse capitale fantôme.

Nic Dunlop/Panos Pictures


Dans les grandes lignes, seuls des hommes d’affaires et des hommes politiques passent à Naypyidaw pour y travailler, mais sans y passer la nuit. Ils préfèrent se payer des allers-retours en avion que d’habiter dans la ville…

Lirneasia / Flickr


Dans le Guardian, un consultant des Nations Unies a raconté sa vision de la ville : « Nous ne savions pas trop à quoi nous attendre. On pensait que la Birmanie était sous-développée. On ne s’attendait pas à ces gigantesques routes. Par contre, c’est complètement désert comme une ville fantôme, à vrai dire, je ne me sens pas à l’aise ici »

Nic Dunlop/Panos Pictures


Si vous souhaitez de vous y aventurer, les seules personnes que vous risqueriez de rencontrer sont des balayeurs de rue, voués à garder la ville propre. Pour qui ? On se le demande bien…

Nic Dunlop/Panos Pictures


L’écrivain globe-trotteur Robert Reid, dans son essai intitulé « A Capital built for Kings and SUVs » («Une capitale construite pour les rois et les SUV », ndlr) a effectué une courte visite de Naypyidaw :


« En dehors de l’hôtel, nous passons devant un arrêt de bus inutilisé et quelques locaux ignorent les panneaux de signalisation, marchant sur les routes à six voies. Un panneau indique l’ouverture prochaine d’une boutique Mitsubishi. Un kilomètre à l’ouest, nous atteignons le quartier commercial avec 185 devantures de boutiques en rose bonbon et bleu ciel. « Seulement cinq boutiques sont ouvertes » me dit mon chauffeur birman, ce qui veut dire que 180 sont vides… Un local me dit : « Beaucoup d’investissement… Quel gâchis ! »

Nic Dunlop/Panos Pictures


Construite il y a plus de dix ans, Naypyidaw reste un véritable mystère à l’heure où la Birmanie vient d’amorcer un nouveau virage politique avec la démocratie, portée par Aung San Suu Kyi, prix Nobel de la paix en 1991 et libérée en 2010 après avoir été assignée à résidence pendant 20 ans.

Soe Zeya Tun / Reuters


À l’heure actuelle, on ne sait pas encore ce qu’il adviendra de cette ville, toujours aussi déserte. Les investisseurs étrangers et la population birmane n’ont jamais semblé très enthousiastes à l’idée d’y déménager. Pas sûr que cela s’arrange avec le temps…

Nic Dunlop/Panos Pictures


Incroyable cette gigantesque ville-fantôme, n’est-ce pas ?

 

Source : The Guardian

Au sujet de l'auteur : Jérémy Birien

Journaliste, rédacteur en chef