Un rapport parlementaire constate que les enseignants seraient déconnectés de la vie sociale de leurs élèves, le corps enseignant s'indigne

Bouton whatsapp

Aurore Bergé, députée de la République en marche et Béatrice Descamps, députée UDI, se sont penchées sur la question de l'éducation et de ses dysfonctionnements. Elles ont dressé un rapport qui n'a pas manqué d'indigner le corps enseignant.

Capture d'écran Twitter @auroreberge

Les « relations écoles-parents » sont évoquées tout le long de ce rapport. Un texte où les deux parlementaires ne sont pas à court d'idées pour améliorer les relations internes propres au monde de l'éducation mais aussi et surtout, elles dressent une liste de recommandations quant aux comportements des enseignants, qui a quelque peu irrité les premiers concernés, les enseignants, donc.

En qualité de corapporteures d'une « mission flash », elles rappellent, avant toute chose que, conformément au code de l'éducation, l'article L.111-1 stipule que « pour garantir la réussite de tous, l’école se construit avec la participation des parents, quelle que soit leur origine sociale. Elle s’enrichit et se conforte par le dialogue et la coopération entre tous les acteurs de la communauté éducative ». Une disposition qui semble avoir été le fil rouge de leurs recommandations soumises au ministre de l'Éducation nationale, ce mercredi 31 janvier.

Un clivage social entre enseignants et élèves observé

Selon les parlementaires, il existe une réelle différence sociale entre les enseignants et les élèves. Une des observations qui semble avoir le plus irrité les enseignants. Ainsi selon les rapporteures, « les jeunes enseignants sont, plus qu’auparavant, issus des classes les plus favorisées de la population française. » Une affirmation qui amènerait à la réflexion suivante : « Lorsqu’ils sont affectés dans des quartiers difficiles, ils n’en sont le plus souvent pas originaires, ils n’en connaissent pas les spécificités et vivent de moins en moins là où ils enseignent ».

Les élues, pour parvenir à combler le fossé observé, conseillent, surtout aux enseignants débutants d'acquérir une meilleure connaissance « sociologique » du quartier où ils sont tenus d'exercer. En somme, on peut comprendre, toujours selon les élues, qu'il est d'utilité non pas de vivre dans le quartier concerné, mais de l'appréhender, d'en connaître les us et coutumes, les valeurs, ses façons de fonctionner mais aussi les problèmes qu'il peut rencontrer. En ce sens, comprendre en quoi les enfants qui viennent s'instruire, peuvent avoir des difficultés plus ou moins importantes. En effet, ces facteurs de clivage « conduisent à un éloignement croissant entre enseignants et parents, qui ne facilitent pas la compréhension des uns et des autres et un traitement d’adulte à adulte ».

« Au mieux banales, au pire tristement idéologiques »

« Banales et idéologiques ». Ce sont les termes qu'à utiliser Fatiha Boudjahlat, cofondatrice du mouvement « Viv(r)e la République » pour décrire les recommandations des deux élues. Le rapport a suscité chez elle un vif intérêt, que l'on ne peut qualifier de positif et a donc souhaité réagir par le biais d'une tribune, qui s'adresse aux élues au nom de tous les enseignants qui se sont sentis heurtés par les déclarations des rapporteures.

« Faut-il en fait des enseignants qui ressemblent physiquement à leurs élèves ? Doivent-ils accomplir une mission d'immersion pour comprendre les difficultés sociales d'un quartier ? Sommes-nous à ce point pris pour des imbéciles? » a questionné Fatiha Boudjahlat, avant de rappeler que « la majorité de ces fabuleuses propositions est déjà mise en œuvre et depuis une dizaine d'années ». Elle dénonce par la suite, un rapport concentré en « stéréotypes sociologiques et infantilise les parents invités à faire connaître leur culture (...) les députées préconisent la mise en place d'une ' semaine du goût ' qui pourrait permettre à ' chaque parent d'apporter une spécialité culinaire de son pays' ! C'est humiliant, paternaliste. Inutile. »

Erreur de combat

« Combien d'élèves excellents dans leurs pays d'origine ont été orientés en filière professionnelle parce qu'on ne leur a pas donné le temps de maîtriser assez le français ? Voilà le scandale » s'est insurgée l'enseignante, préconisant de s'inquiéter d'autres choses que de savoir si les écoles vont faire en sorte que l'on « nous fasse découvrir le couscous et le mafé ! » car « les parents attendent autre chose de l'école. Une chose que les députées n'attendent plus : l'instruction. »

Et si Fatiha Boudjahlat avait à cœur de répondre par le biais d'une tribune, les enseignants s'en sont donnés à cœur joie sur Twitter et ont moqué les rapporteures. En voici une belle sélection.

Au sujet de l'auteur : Pauline Masotta

Journaliste