Gaza : 59 Palestiniens tués par l'armée israélienne alors qu'ils manifestaient contre l'ouverture de l'ambassade américaine à Jérusalem

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Près de 60 Palestiniens de Gaza ont été tués par les forces israéliennes ce lundi 14 mai, alors qu'ils protestaient à la frontière israélo-palestinienne, contre le transfert de l'ambassade Américaine à Jérusalem. Journée symbolique pour les Israéliens qui fêtaient également les 70 ans de la création de l'État hébreu. Amnesty International dénonce une « violation abjecte » des droits de l'Homme.

Gaza pleure ses morts tandis que Jérusalem sabre le champagne pour fêter son ambassade. Ce lundi 14 mai, jour de fête côté israélien, entre le transfert de l'ambassade américaine à Jérusalem et la célébration du 70e anniversaire de l'État hébreu, a été la journée la plus meurtrière et sanglante depuis 2014, côté palestinien. Le bilan n'a cessé de s'alourdir, et s'élève maintenant à au moins 59 morts et 2400 blessés à la frontière de la bande de Gaza, par tirs ou par inhalation de gaz, selon le ministère. La communauté internationale dénonce et déplore ces vies perdues arrachées par des balles réelles. « Lorsque des personnes s'éloignent en courant et qu'on leur tire dans le dos, ce n'est pas une menace imminente » a déclaré Francis Perin, vice-président d'Amnesty International France, à France Info.

Et de rajouter que « très clairement, il y a eu une nouvelle fois un usage excessif de la force de la part de l'armée israélienne à qui l'on donne des ordres illégaux consistant à tirer sur des manifestants qui sont non-armés ». Selon lui, les violences perpétrées par les forces israéliennes à l'encontre des Gazaouis, relève d'une « violation abjecte » du droit international : « On ne peut utiliser des armes de guerre et des balles réelles pour tirer sur des personnes, que s'il y a une menace directe et imminente pour les policiers et militaires impliqués ou en vue de protéger d'autres personnes. Lorsque des personnes sont à plusieurs centaines de mètres d'une frontière, ce n'est pas une menace imminente. Lorsque des personnes agitent des drapeaux palestiniens et qu'on leur tire dessus, ce n'est pas une menace imminente. »

Large condamnation de la communauté internationale

Affirmant ainsi que l'armée israélienne a violé le droit international, Amnesty International pointe du doigt ces tueries, qui s'apparentent pour l'ONG a des crimes de guerre : « Ceci est un autre exemple horrible de l'armée israélienne qui utilise une force excessive et des munitions réelles d'une manière totalement déplorable. Ceci est une violation des normes internationales, commettant dans certains cas ce qui semble être des tueries délibérées constituant des crimes de guerre » a déclaré Philip Luther, directeur de la recherche et du plaidoyer pour le Moyen-Orient et l'Afrique du Nord à Amnesty International, basée à Londres.

La Turquie et l'Afrique du Sud ont, quant à eux, condamné très sévèrement les événements survenus le 14 mai. Selon Pretoria, « les victimes étaient en train de participer à des manifestations pacifiques contre l'inauguration de l'ambassade des États-Unis à Jérusalem qui constitue une provocation » tandis que Recep Tayyip Erdogan a imputé à Israël un génocide, alors qu'il s'exprimait devant des étudiants turcs à Londres : « Ce qu’Israël a fait est un génocide. Je condamne ce drame humanitaire, ce génocide, d’où qu’il vienne, d’Israël ou d’Amérique ». Le premier ministre turc, Binali Yildirim, a de son côté, accusé les États-Unis et Israël d'êtres complices d'un « crime contre l’humanité ».

La France réagit, Emmanuel Macron condamne

Du côté de la France, Emmanuel Macron s'est montré ferme lors d'entretiens téléphoniques avec Mahmoud Abbas, son homologue palestinien et le roi de la Jordanie Abadallah II et a « condamné les violences des forces armées israéliennes contre les manifestants » palestiniens. L'occasion pour le président Français d'exprimer « la désapprobation de la France à l’encontre de la décision américaine d’ouvrir une ambassade à Jérusalem ». Une décision qui, selon le président turc, Recep Tayyip Erdogan, a un impact sur le rôle de médiateur des États-Unis sur le conflit israélo-palestinien.

Le chef de l'État a « déploré le grand nombre de victimes civiles palestiniennes à Gaza » et a exprimé « la vive préoccupation de la France sur la situation à Gaza, à Jérusalem et dans les villes palestiniennes ». Benoît Hamon, a de son côté, condamner les gouvernements israélien et américain : « À Gaza, le gouvernement israélien et Trump sont responsables d'un bain de sang. La France doit sortir des formules de condamnation d'usage, mobiliser l'Union européenne et agir pour la reconnaissance de la Palestine. Il faut enrayer la spirale guerrière. »

Le Hamas, seul responsable selon les États-Unis

Silence radio du côté du président américain Donald Trump et de son vice-président, Mike Pence. Se murer dans le silence pour ne pas s'opposer aux violences ? En tout cas, pour Raj Shah, le porte-parole adjoint de l'exécutif américain, seul le Hamas est responsable de ces 59 vies ôtées : « La responsabilité de ces morts tragiques repose entièrement sur le Hamas. Le Hamas provoque intentionnellement et cyniquement cette réponse » a-t-il déclaré lors d'un point accordé à la presse. Et de rajouter que « cela fait des semaines que le gouvernement israélien essaie de gérer cela sans violence ». Et pendant qu'un bain de sang s'opérait côté palestinien, Donald Trump tweetait sa joie : « Grand jour pour Israël. Félicitations ! ».

De son côté, l'Union européenne a intimé « à toutes les parties d’agir avec la plus grande retenue afin d’éviter des pertes de vies humaines supplémentaires » emboîtant le pas à Theresa May, la première ministre britannique qui a, elle, appelé « au calme et à la retenue pour éviter des actions destructrices pour les efforts de paix ». Antonio Guterres, le secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies s'est quant à lui décrit comme étant « particulièrement inquiet ».

Une marche pour réclamer les terres perdues

Après avoir enterré leurs proches, les Gazaouis devraient conclure ce mardi 15 mai la « marche du grand retour » entamée le 30 mars, en direction de la barrière de sécurité israélienne. C'est l'un des responsables du Hamas, Khalil al-Hayya, qui a confirmé que cette marche serait assurée, selon l'AFP. Cette « marche du grand retour » est entreprise pour réclamer les terres perdues lors de la création de l'État d'Israël il y a 70 ans, en 1948 mais aussi pour commémorer la « Nakba » ou l'exode de centaines de milliers de Palestiniens. Depuis le 30 mars et le début de la marche du « grand retour », 113 Palestiniens ont trouvé la mort tandis qu'un seul soldat israélien a été blessé.

À la demande du Koweït qui a condamné « ce qu'il s'est passé, précisant qu'il y aura une réaction de notre part », le Conseil de sécurité de l'Organisation des Nations Unies doit se réunir ce mardi 15 mai à 16 heures, heure française.

Source : AFP

Au sujet de l'auteur : Pauline Masotta

Journaliste