Des infirmières et des chirurgiens travaillant tout nus pour limiter la propagation de germes ? Une idée pas aussi folle qu'on pourrait le penser

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Les chirurgiens devront-ils bientôt se mettre tout nus pour opérer, afin de réduire les risques sanitaires ? L'idée peut sembler farfelue, mais aussi invraisemblable qu'elle puisse paraître, elle n'est pas si bête que cela.

Dans un article scientifique, publié par l'Université de Washington, une équipe de physiciens a noté un fait étonnant : une personne intégralement nue répandrait moins de germes et de bactéries... qu'une personne portant une blouse médicale stérile, telles que celles portées dans les salles d'opération par le personnel médical !

En cause de ce résultat, qui peut prêter à sourire, mais qui n'en demeure pas moins très sérieux : les frottements répétés, occasionnés par les vêtements sur la peau. Même si ces derniers sont justement censés être étudiés pour garantir une propreté maximale, les microfrottements provoqués de manière continue par le tissu sur la peau lors de chacun de nos mouvements détachent de minuscules particules et des peaux mortes, ce qui provoque la chute de germes qui se disséminent tout autour.

Chirurgiens pratiquant une opération / Shutterstock

Bien sûr, ce n'est probablement pas demain la veille que les chirurgiens et les infirmières seront obligés de travailler dans leur plus simple appareil, transformant les blocs opératoires en véritables camps de nudistes (dommage, diront certains !).

En revanche, cette étude n'en reste pas moins très intéressante, parce qu'elle remet en question des idées communément établies et interroge l'utilité réelle de certaines conventions de la profession. Par exemple, il y aurait peu ou pas de différence, au niveau de la contamination provoquée, entre le port d'un habit normal et celui d'une blouse spécialisée.

« La chirurgie nudiste n'existera probablement jamais... et je doute qu'elle soit un jour étudiée ! » s'amuse le docteur Patchen Dellinger, qui a dirigé l'étude. Cependant, les faits sont là : « En termes de diffusion de bactéries dans l'air, une personne nue contamine beaucoup moins son environnement qu'une personne portant des habits. »

« La plupart des germes que nous produisons se retrouvent dans l'air par l'intermédiaire de minuscules flocons de peaux mortes, que l'on appelle les squames. Si vous portez des vêtements, cela frotte les couches externes de la peau et favorise le détachement de ces squames, qui se retrouvent ensuite en flottaison dans l'air. Lorsque vous ne portez aucun vêtement, cela se produit beaucoup moins. »

Une équipe de chirurgiens au travail /Shutterstock

Le docteur Dellinger et son équipe ont interrogé le sens de certaines normes en vigueur dans la profession... et notamment la forme des blouses chirurgicales elles-mêmes.

« Les vêtements normaux, ceux que l'on porte au quotidien en ville, sont tissés plus serré et ont des ourlets plus petits au niveau des manches et des pantalons que les casaques et les vêtements chirurgicaux », explique Patchen Dellinger . « Pour autant, je ne voudrais pour rien au monde porter ma chemise et ma cravate en bloc opératoire, car ce serait beaucoup trop salissant et j'aurais peur de les tacher ! »

Pour lui, l'intérêt de ces vêtements réside davantage dans la protection des habits des professionnels, que dans celle de la santé des patients. Un autre point à prendre en considération, néanmoins : un vêtement venu de l'extérieur de l'hôpital pourrait être porteur de germes ou être contaminé par des bactéries, donc véhiculer des maladies. Les blouses des chirurgiens, elles, sont stérilisées... mais si nos vêtements de tous les jours étaient eux aussi stérilisés, ils seraient tout autant (voire plus) efficaces que les fameux habits verts des médecins !

Les chercheurs ont, en outre, observé que les hommes produisent environ deux fois plus de germes que les femmes... et que les femmes portant des collants ou des bas dans la salle d'opération apportaient un risque plus grand que celles qui avaient les jambes nues. Le docteur Dellinger se souvient : « Quand j'étais étudiant en médecine, dans les années 1970, on demandait aux infirmières de porter des jupes et des bas... mais de nombreux éléments démontrent que les jambes nues disséminent en réalité beaucoup moins de bactéries que les jambes recouvertes de bas. »

« Aujourd'hui, de nouvelles normes sanitaires imposent le port de la charlotte dans les milieux aseptisés, afin de recouvrir totalement les cheveux. Là aussi, les preuves que cela apporte quelque chose de différent sont bien maigres. »

Blouses et stéthoscope accrochés à un cintre / Shutterstock




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Au sujet de l'auteur : Nathan Weber

Journaliste