Conçu avec de l'herbe séchée, le dernier pont suspendu inca du monde tient depuis six siècles

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Au Pérou, le pont Q’eswachaka reste le dernier pont suspendu inca au monde. Conçu avec de l’herbe séchée, il est là depuis six siècles et est rénové chaque année selon la tradition.

Crédit photo : iStock

Partons à l’aventure si vous le voulez bien ! Lorsqu’on imagine un voyage au Pérou, on pense évidemment au Machu Picchu, l’une des sept merveilles du monde moderne. Cependant, il existe une autre architecture issue de la civilisation inca qui vaut le détour, inscrite au patrimoine immatériel de l’humanité.

Il s’agit du pont Q’eswachaka, situé dans la région de Cuzco, dans le canyon de la rivière Apurimac, à 28 mètres de hauteur. Ce pont suspendu est un ouvrage vieux de six siècles et est le dernier pont suspendu inca au monde.

Sa particularité est qu’il est conçu à partir d’une herbe séchée : la q’oya. Chaque année au mois de juin, les communautés natives de la région s’affairent à rénover ce pont en l’espace de trois jours, comme le veut la tradition. Maintenant que la pandémie est terminée, les indigènes tentent de regagner l’intérêt des visiteurs pour l’une des traditions les plus marquantes de cette région.

Crédit photo : Unesco

Les femmes de la communauté, arborant des jupes multicolores, coupent la q’oya dans les champs à coups de faucille, puis la tressent. Elles forment ainsi d’épaisses cordes que les hommes se chargent de porter sur leurs épaules.

Pendant tout le processus de confection, la tradition requiert le sacrifice d’un agneau en guise d’offrande aux dieux de la terre et de la montagne pour “qu’aucun accident ne se produise”. Les divinités sont évidemment très présentes dans cette tradition qui se perpétue de génération en génération depuis les pré-Incas.

Un pont qui appartient aux sirènes de la rivière

Lorsque que les cordes constituent le prochain pont sont terminées, elles remplacent directement l’ancien. Les hommes passent les cordes les plus épaisses d’un bout à l’autre pour poser les bases du nouveau pont, puis l’ancienne structure est retirée, tombant dans la rivière, se laissant emporter par le courant.

Crédit photo : Unesco

Pour finaliser la rénovation, ils installent les deux grosses cordes qui serviront de mains courant, puis les plus fines, qui se comptent par milliers, qui sont nouées entre elles. Puis vient le tablier afin de créer un garde-fou sur le pont, en guise de sécurité.

Un travail de longue haleine durant lequel les hommes, qui ne connaissent pas le vertige, mâchent des feuilles de coca pour lutter contre la fatigue. Pendant l’installation finale du pont, les femmes sont exclues mais cela n’a rien à voir un quelconque sexisme. Selon la tradition, ce pont serait la propriété des sirènes qui seraient tout simplement jalouses.

Crédit photo : Unesco

Enfin, lorsque les équipes de deux côtés se rejoignent, il crient “Haylly Q’eswachaka”, afin d’annoncer la renaissance du pont, qui fait une trentaine de mètres de long et un peu plus d’un mètre de large.


Au sujet de l'auteur : Jérémy Birien

Journaliste, rédacteur en chef