Un Américain à l'origine d'un antivenin “sans précédent” après s'être laissé mordre 200 fois par des serpents venimeux

Depuis 18 ans, Tim Friede s’est volontairement laissé mordre 200 fois par des serpents venimeux, à tel point que son sang pourrait constituer un antivenin révolutionnaire en matière de santé.

Combattre le mal par le mal ! En 18 ans, Tim Friede est devenu une véritable curiosité scientifique à cause de son passe-temps très particulier. Au total, il a subi 200 morsures de serpents et plus de 700 piqûres réalisées à partir du poison de serpents venimeux comme les mambas ou les cobras.

Ce samedi 3 mai, la BBC révèle que Tim Friede pourrait être à l’origine de la fabrication d’un anti venin révolutionnaire. En effet, selon les tests menées sur des animaux, les anticorps retrouvés dans le sang de Tim Friede joueraient un rôle protecteur inédit contre les doses mortelles d’une majorité d’espèces de serpents.

Au départ, Tim Friede, un Américain téméraire, voulait renforcer son immunité pour se protéger lorsqu’il manipule des serpents, documentant ses exploits sur YouTube. Une expérience qui avait mal débuté puisque deux morsures de cobra l’ont plongé dans le coma.

Tim Friede et les serpentsCrédit photo : Tiim Friede

“Un mode de vie”

Malgré cela, il a continué à se motiver pour de développer de meilleures thérapies pour le reste du monde :

"C'est devenu un mode de vie et j'ai continué à pousser, pousser et pousser aussi fort que possible, pour les gens qui meurent de morsures de serpent à 8.000 kilomètres de chez moi. Je ne voulais pas mourir. Je ne voulais pas perdre un doigt. Je ne voulais pas manquer le travail"

Jusqu’ici, un antivenin est fabriqué à partir de petite dose de poison que l’on injecte à des animaux, comme les chevaux, afin que leur système immunitaire produise des anticorps. Ces derniers sont ensuite récoltés mais les antivenins correspondent généralement à l’espèce de serpent concernée.

Tim Friede et les serpentsCrédit photo : Tiim Friede

Concrètement, un même antivenin ne fonctionne pas de la même manière, qu'il s'agisse d'une morsure de taïpan ou de crotale en raison des toxines variant d'une espèce à l'autre. Il existe d'ailleurs une grande diversité au sein d'une même espèce. Par exemple, l'antivenin fabriqué à partir de serpents en Inde est moins efficace contre la même espèce au Sri Lanka.

Une équipe de chercheurs a donc entamé des recherches pour un anticorps ciblant les parties communes à une majorité de toxines. C'est alors que le Dr Jacob Glanville, directeur général de la société de biotechnologie Centivax, a rencontré Tim Friede.

"Immédiatement, je me suis dit que si quelqu'un au monde avait développé ces anticorps à large neutralisation, c'était lui, et je l'ai contacté. Lors du premier appel, j'ai dit: 'Cela risque d'être gênant, mais j'aimerais beaucoup mettre la main sur un peu de votre sang'".

L’espoir d’un antivenin universel

Tim Friede a accepté et la recherche s'est concentrée sur les élapidés, l'une des deux familles de serpents venimeux, qui utilisent des neurotoxines pour paralyser leur victime et bloquer les muscles nécessaires à la respiration. Les scientifiques ont donc cherché dans le sang de Tim Friede des défenses adaptées.

Les chercheurs ont publié les résultats de leurs travaux dans la revue scientifique Cell. Ils affirment avoir identifié deux anticorps largement neutralisants pouvant cibler deux classes de neurotoxines. Ils y ont ajouté un médicament ciblant une troisième classe pour constituer leur cocktail.

Tim Friede et les serpentsCrédit photo : Tiim Friede

Celui-ci a permis à des souris de survivre à des doses mortelles de 13 des 19 espèces lors des expériences. Les rongeurs ont bénéficié d'une protection partielle contre les six restants. Pour le Dr. Granville, il s'agit d'une protection d'une ampleur "inégalée", qui pourrait couvrir “toute une série d'élapidés pour lesquels il n'existe pas d'antivenin à l'heure actuelle".

Les chercheurs se donnent encore 10 à 15 ans pour produire un antivenin efficace contre chacune des classes de toxine :

"Les anticorps de Tim sont vraiment extraordinaires. Il a appris à son système immunitaire à obtenir une reconnaissance très large. Il ne fait aucun doute que ce travail fait avancer le domaine dans une direction passionnante”

Cependant, l'antivenin doit encore faire l'objet de tests approfondis avant de pouvoir être utilisé chez l'homme. En attendant, Tim Friede est très enthousiaste à l’idée d’apporter sa pierre à l’édifice dans ce développement révolutionnaire d’antivenins.

"Je fais quelque chose de bien pour l'humanité et c'était très important pour moi. J'en suis fier. C'est vraiment cool"

C’est donc un motif d’espoir inédit pour permettre à terme de développer un vaccin universel. Car à l’heure actuelle, les antivenins doivent être constamment adaptés à l’espèce du serpent venimeux à l’origine d’une morsure. Selon la BBC, les morsures de serpents tuent en moyenne 140 000 personnes par an, sans compter les amputations et handicaps provoqués par les conséquences du venin chez les rescapés.

Source : BBC
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