« Nous avons échoué » : c'est le terrible communiqué des scientifiques annonçant que la Grande Barrière de corail vit probablement ses dernières heures...

Bouton whatsapp
Elle est la plus grande structure jamais créée par des organismes vivants au monde.

À la différence de la Grande Muraille de Chine, ridiculement petite en comparaison, elle peut être vue depuis l'espace. Unique au monde en son genre, la Grande Barrière de corail compte plus de 2 900 récifs et quelque 900 îles s'étirant au large de l'Australie, de Bundaberg à la pointe du Cap York, sur plus de 2 600 kilomètres de long. Avec plus de 344 400 km² de superficie, il s'agit sans conteste d'une des plus grands chefs-d’œuvre de la nature, une merveille de biodiversité qui abrite plus de 3 000 variétés de mollusques, dans laquelle s'ébattent 1 625 espèces différentes de poissons, des centaines de variétés de méduses, de requins et de raies, qui dépendent d'elle pour leur survie.

Et pourtant, ce joyau de la planète Terre, qui a commencé à se former il y a plus de 18 millions d'années, est sur le point d'être détruit, de l'avis de bon nombre de scientifiques. En état critique, le « plus grand organisme vivant du monde » serait atteint de l'équivalent d'un « cancer en phase terminale »

Pire : la situation aurait atteint un point « irréversible »
dans de larges portions du récif, dans lesquelles les coraux n'ont désormais même plus aucun espoir de guérison.
Australian Geographic


Le fameux « cancer » qui gangrène la Grande Barrière de corail, c'est le blanchiment corallien, ou blanchissement des coraux. Il s'agit d'un phénomène de dépérissement massif des coraux, qui se traduit par une décoloration du récif. Il est causé par la disparition des zooxanthelles, des algues microscopiques qui vivent en symbiose avec les coraux : en échange d'un abri et d'une exposition lumineuse suffisante, elles fournissent à leur hôte de l'oxygène et des nutriments, dont le corail tropical dépend essentiellement pour sa survie.

Mais voilà : lorsque le corail est en situation de stress, il réagit en expulsant ces micro-organismes. Ces derniers peuvent aussi mourir à cause de la perte de la pigmentation de ces algues. Résultat, les coraux finissent par mourir de faim ou de maladie…

Dans les zones ainsi touchées, il ne reste plus que leurs squelettes, des structures blanches et sans vie, qui s'étalent sur des kilomètres. On appelle ces vastes surfaces des « zones mortes » : comme le corail est une « espèce parapluie », c’est-à-dire un organisme clé de son écosystème, tous les autres animaux, poissons, mollusques et crustacés meurent à leur tour, ou sont obligés de partir. Ces endroits ne forment plus qu'un gigantesque désert sous-marin, un triste cimetière dénué de vie.

Via le monde.fr


Au cours de l'histoire, il n'y a eu que quatre périodes de blanchissement corallien massif : en 1998, 2002, 2016 et à présent, en 2017. Ces événements sont déclenchés par une réaction de stress de coraux qui les forcent à éjecter les algues micro-organiques nécessaires à leur survie : cela peut être dû à un changement de température de l'eau (réchauffement climatique global) mais aussi à l'augmentation de l'acidité, en raison du CO2 produit en excès dans l'atmosphère par les activités humaines, ou encore de produits polluants déchargés dans l'océan, voire les trois en même temps.

Les coraux ainsi affectés ne meurent pas nécessairement, et cela peut ne demander que quelques décennies pour atteindre une récupération partielle, car même s'il est fragile la grande richesse de la biodiversité lui donne un fort pouvoir pour se régénérer. Mais lorsque les organismes meurent en très grand nombre, la situation peut atteindre un point critique qui peut la rendre irréversible, représentant une forme de mort clinique de la structure corallienne.

Ainsi, au total, dans le monde, 20 % des récifs ont déjà été détruits de façon définitive et irrécupérable ces dernières années. Et on estime que 50 % des coraux du monde seront menacés d’ici trente à cinquante ans (les coraux des mers plus froides sont moins touchés).


Les scientifiques résignés : « Nous avons abandonné tout espoir »

En ce qui concerne la Grande Barrière, le bilan est terrifiant, selon les dernières études qui ont été faites pour en évaluer l'état de santé. Des chercheurs Australiens de la James Cook University ont publié le résultat de leurs dernières observations dans un communiqué officiel… Et le moins qu'on puisse dire, c'est que ça n'est pas très rassurant.

Deux tiers de la Grande Barrière seraient directement menacés : Sur les 2 600 kilomètres qui constituent la superstructure organique, plus de 1 500 kilomètres seraient désormais blanchis. Des dommages irrécupérables, jugent les scientifiques, car les coraux ont déjà subi de très forts traumatismes en 2016 et n'ont pas eu le temps de récupérer.


Interviewés par le titre britannique The Guardian, les chercheurs ne cachent pas leur pessimisme, leur abattement et leur dégoût :  « Nous avons abandonné tout espoir », lâche Jon Brodie, expert en qualité des eaux, fustigeant au passage l'échec des mesures prises par le Gouvernement australien et le manque de réaction de la communauté internationale au cours des dernières années « J'ai sacrifié ma vie entière pour tenter d'améliorer la qualité de l'eau. Nous avons échoué. » Une résignation d'autant plus insupportable à entendre, un fatalisme d'autant plus intolérable, qu'il est celui de personnes qui ont porté corps et âme la lutte pour la préservation des coraux, qui ont voué leurs vies à l'étude de ces organismes.

Malheureusement, et même si c'est aussi douloureux à écrire, nous serons probablement la dernière génération à avoir la chance d'admirer la beauté grandiose de ce qu'il reste de la Grande Barrière de corail. Le phénomène du réchauffement climatique entraînant une hausse croissante des températures globales du monde, inévitablement, le blanchissement corallien n'est pas près d'être enrayé.

Reef tour
Source : Coralcoe.org
Inscrivez-vous à la Newsletter de Demotivateur !
En renseignant votre adresse email, vous acceptez de recevoir notre newsletter

Au sujet de l'auteur : Nathan Weber

Journaliste