Comme à son habitude, le président des États-Unis Donald Trump s'est servi de Twitter comme d'une tribune pour s'adresser à son peuple.
Trois petits tweets, qui ont rapidement enflammé le pays, puis le monde : En moins de 140 caractères, Trump venait d'annoncer qu'il avait pris la décision de bannir, purement et simplement, les personnes Trans de l'armée étasunienne.
« Après consultations avec mes Généraux et mes experts militaires, soyez informés que le Gouvernement des États Unis d'Amérique n'acceptera désormais plus les individus Transgenres au sein de tous les postes relatifs à l'armée. Nos forces militaires doivent être concentrées sur la victoire décisive et écrasante, et ne peuvent pas s'embarrasser du fardeau des coûts médicaux et des perturbations que la présence de transgenres dans l'armée entraînerait. Merci. »
After consultation with my Generals and military experts, please be advised that the United States Government will not accept or allow......
— Donald J. Trump (@realDonaldTrump) 26 juillet 2017
....Transgender individuals to serve in any capacity in the U.S. Military. Our military must be focused on decisive and overwhelming.....
— Donald J. Trump (@realDonaldTrump) 26 juillet 2017
....victory and cannot be burdened with the tremendous medical costs and disruption that transgender in the military would entail. Thank you
— Donald J. Trump (@realDonaldTrump) 26 juillet 2017
L'annonce du président n'a pas tardé à faire réagir, et a déclenché de vives réactions, notamment chez la communauté Trans, mais également au sein des armées du pays américain où de nombreux membres du personnel ont pris la défense de leurs collègues transgenres et transsexuels.
« Au début, j'étais juste choquée, je ne comprenais pas, puis j'ai senti la colère monter et prendre le pas sur l'incompréhension, explique Carla Lewis, vétéran transsexuel de l'US Airforce, dans une tribune libre sur le site du Huffington Post États-Unis. Depuis les sept derniers mois, j'ai observé notre président enchaîner les formules chocs et les contre-vérités. Mais sa dernière intervention a baissé la barre d'un discours présidentiel au plus bas de tous les temps. »
Comme Carla Lewis l'explique, le simple fait de considérer les personnes trans pourraient d'une quelconque manière empêcher l'armée d'atteindre « une victoire écrasante » sur ses adversaires peut déjà susciter bon nombre d'interrogations : aucun rapport ne fait état d'une quelconque « perturbation » occasionnée par les transgenres au sein de l'armée des États-Unis, pas plus que d'une éventuelle baisse de l'efficacité ou de la cohésion de groupe liée à leur présence. Mais, outre cela, parler d'un prétendu « fardeau des coûts médicaux » occasionné par les trans est, au mieux hypocrite, au pire, d'une affligeante bêtise.
Carla Lewis : « Je me suis battu pour que tu aies le droit de me haïr »
En effet, le nombre de transgenres parmi les soldats et les fonctionnaires de l'armée américaine est estimé à 15 000 : d'un point de vue purement économique et logique, licencier 15 000 personnes est une opération extrêmement coûteuse en soi. Le coût de la formation et de l'équipement d'un seul marine est d'environ 45 000 dollars américains, et il est beaucoup plus élevé pour les unités spécialisées. Au final, devoir réentraîner de nouveaux soldats pour les remplacer représenterait un gouffre financier sans nom, sans compter la perte des années d'expérience déjà acquises par ces soldats.
« Pour quelqu'un qui prétend valoriser la loyauté des soldats, le Président échoue à comprendre la loyauté immense nécessaire aux transgenres de notre pays qui font le choix d'entrer dans l'armée,» dénonce Carla Lewis. Et de raconter comment elle a souffert dans sa carrière en tant que femme trans, les portes qui lui ont été fermées à cause de sa dysphorie de genre, comment elle a dû s'accrocher coûte que coûte afin d'accomplir son rêve et d'entrer dans l'armée de l'air.
Comme Carla Lewis, de nombreux et nombreuses vétérans transgenres ont fait part de leur indignation : «J'ai donné toute ma jeunesse (de 19 è 26 ans) au service de ce pays. C'est tout ce que je sais. C'est outrageant et complètement malsain », explique un dénommé Tomi Kay sur Twitter.
« Moi, personne trans, j'ai fait plus pour le service et la défense des États-Unis que ce que Trump ne fera jamais », déclare la dénommée Emily Gorcenski.
Si les paroles de Donald Trump inquiètent autant, explique Carla Lewis, c'est aussi à cause de leur grande ambiguïté, qui laisse un bon nombre de questions en suspens. Trump parle de bannir les transgenres de «tous les postes relatifs à l'armée»... Dès lors, quelles seraient les personnes concernées par cette décision ? Les employés gouvernementaux qui supportent l'armée ou qui travaillent en collaboration avec elle risquent-ils également de perdre leurs postes ? Les contractuels privés qui emploient des transgenres seront-ils forcés par décret de licencier leur personnel ?
Et Carla Lewis de conclure : « Partout dans le monde, des soldats, des marins, des pilotes, des marines trans mettent leur vie en péril pour défendre ce pays... Et ils se demandent quand viendra le jour ou leur pays se lèvera pour les défendre, eux. »