Son cercueil pas encore refermé, les manœuvres de récupération autour de Simone Veil par des militants anti-IVG commencent déjà

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Le nom de domaine simoneveil.com a été déposé par... le groupe anti-IVG « Les Survivants », qui ont décidé de s'arroger le combat de l'ex-ministre de la Santé dans une stratégie plus que douteuse de récupération afin de plaider leur cause. Petite leçon d'irrespect et de réécriture d'histoire.

Derrière cette image, qui orne la page d'accueil du site simoneveil.com, se cache en fait... une manœuvre de propagande anti-IVG.  Tous les codes y étaient pourtant : le portrait de Simon Veil dans un style graphique rappelant celui de Shepard Fairey (le street-artiste créateur de la fameuse affiche «Hope » de Barack Obama), l'inscription «Forever» dont la lettre O est remplacée par le symbole de la Femme... On jurerait avoir affaire à un hommage sincère pour honorer la mémoire d'une figure de proue majeure de la lutte pour le droit des femmes, décédée la semaine dernière.

L'illusion était telle que de nombreux internautes ont choisi de la partager sur les réseaux sociaux, pour rendre hommage à la femme politique, qui nous a quittés ce vendredi 30 juin à l'âge de 89 ans.

SIMONEVEIL.COM (Capture d'écran)

Surprise ! L'image avait en fait été créée de toutes pièces par le groupe anti-avortement «Les Survivants»,  comme ces derniers l'ont révélé hier, tout fiers de leur coup d'éclat. Alors qu'avaient lieu les obsèques nationales de Simone Veil aux Invalides, ils ont profité du feu des projecteurs pour révéler la supercherie...

Et notamment le fait qu'ils avaient, en patients petits charognards, acheté le nom de domaine simoneveil.com depuis 2016.

Sûr que la défenseuse des droits des femmes aurait apprécié la récupération de son image, autour de son cadavre encore tiède. Mais les « Survivants », eux, sont très fiers d'avoir réussi leur minable pari, et d'avoir pu « troller » les internautes.

Sur les réseaux sociaux, l'attitude à vomir de ce groupe né dans le sillage de la «Manif Pour Tous» a largement été dénoncée. Aujourd'hui, jeudi 6 juillet, le site a été mis hors-service au cours de l'après-midi, par ce qui s'apparente à une attaque par déni de service (DDOSS) probablement initiée par des cyber-militants.

Les pros de la « vérité alternative »

Au niveau de la forme, donc, un troll savamment orchestré. Au niveau du fond, là... Pas grand-chose, à vrai dire, à tirer de cette vase pourtant auto-définie comme « un web-documentaire ».

Au programme, on aura le plaisir de retrouver une sorte de best-of des meilleurs poncifs de la propagande anti-IVG, une biographie de Simone Veil revisitée à la sauce survivante (où l'on insistera bien lourdement sur le fait qu'elle aimait sa famille et que, comme elle a survécu à la barbarie Nazie, elle aimait la vie et détestait la mort, sans blague), et surtout, l'argument-choc : la fameuse loi légalisant l'avortement, promulguée par l'ex-ministre de la Santé, aurait été... détournée de ses intentions premières, qui étaient donc anti-IVG (logique implacable).

Simone Veil, une femme trahie dans ses intentions, vraiment ? L'argument se résume en fait à quelques phrases savamment choisies, prononcées par la femme politique, et soigneusement tirées hors de leur contexte. Par exemple : « l’avortement doit rester l’exception, l’ultime recours pour les situations sans issue » . Comment expliquer à ces gens que l'on peut défendre le droit des femmes à pratiquer l'IVG,  sans pour autant vouloir favoriser les grossesses non-désirées  ? Les « survivants » pensent-ils réellement, en leur âme et conscience,  que les personnes ayant aujourd'hui recours à l'avortement le font par plaisir et par gaîté de cœur ?

C'est ici, peut-être, que se situe la mince frontière qui sépare la bêtise sincère de l'hypocrisie manipulatrice. 


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Au sujet de l'auteur : Nathan Weber

Journaliste