Tout le monde parle de la corrida... et on ferme les yeux sur la pratique horrifiante de la torture des chiens « galgos » par les chasseurs en Espagne

Ce samedi, la mort du matador espagnol Ivan Fandiño a, comme à chaque fois qu'un tel événement se produit, relancé le débat sur la toromachie. L'homme, qui n'était âgé que de 36 ans, toréait lors d'une corrida à Aire-sur-Adour quand, suite à un faux mouvement, il a été frappé par la corne d'un taureau qui lui a perforé le poumon. Il est rapidement décédé des suites de sa blessure.

Si la corrida reste une pratique très controversée qui voit depuis longtemps déjà s'affronter ses détracteurs et ses défenseurs, la mort de cet homme reste un événement tragique, particulièrement douloureux pour les proches, pour lequel il convient logiquement d'observer un minimum de décence et de retenue. On peut être contre la corrida, sans pour autant se réjouir de la mort d'une personne, comme l'ont d'ailleurs rappelé plusieurs associations animalistes et organisations de défense des droits des animaux.

Là où les anti-taurins fustigent une pratique venue d'un autre temps qui fait de la violence un spectacle, les défenseurs de la corrida mettent en avant une tradition séculaire, une culture extrêmement codifiée, et arguent que les «toros» élevés en plein air vivent une vie plus heureuse que leurs congénères élevés dans des fermes-usines, pour au final un résultat similaire : la mort, puis la consommation humaine. La question mérite donc d'être posée : de l'abattoir ou bien de l'arène, quelle est la mort préférée des bovins ? 

Le débat continuera sans doute longtemps, tant que les animaux ne sauront pas parler pour nous le dire. Pourtant, il existe, au sud de la Navarre, une autre pratique, dont presque personne ne parle, et dont la barbarie n'a d'égale que son inutilité la plus profonde. En effet, en Espagne, des animaux sont tués, torturés, lentement mis à mort. Et cela, ni dans le but de finir dans les assiettes, ni même par «sport»... mais simplement pour se débarrasser d'eux.

Il s'agit du traitement abominable réservé aux lévriers galgos, une race de chiens couramment utilisés pour la chasse.

Galgo moto

Car, quitte à pointer nos voisins transpyrénéens d'un doigt accusateur (ils sauront bien nous rendre la pareille en parlant foie gras), cette pratique devrait nous choquer tout autant, voire plus, que celle de la corrida.  En effet, chaque année, près de 50 000 galgos seraient tués ou abandonnés, laissés à demi-morts après avoir été torturés de manière atroce.

Les lévriers galgos sont des chiens de chasse, des animaux magnifiques, doux et sensibles, qui sont élevés par des chasseurs pour pratiquer la chasse à courre et traquer les lièvres et autres petits animaux. Une tradition ancestrale, qui mêle la pratique de la chasse au dressage des chiens, à leur élevage et à leur sélection. La constitution d'une meute de chiens soudée et performante, travaillant en équipe, fait partie intégrante de l'intérêt que ces chasseurs dresseurs de lévriers (les galgueros, comme ils sont appelés localement) trouvent à cette activité.

Lorsqu'un gibier est repéré, les animaux sont lâchés, et une course-poursuite s'ensuit. Tout est extrêmement codifié : le chien doit rattraper sa proie « à la loyale », gage que l'animal a été bien dressé par son maître.

Le problème, c'est que certains de ces chasseurs  se livrent à toutes sortes d'atrocités et d'abominations afin d' « optimiser » au maximum leur élevage de chiens et de sélectionner les meilleurs individus, au détriment des plus faibles. Ces derniers sont souvent lâchement abandonnés, quand ils ne sont pas tout simplement mis à mort de la plus cruelle des manières par leurs propriétaires. 

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Mais ce n'est pas tout : les conditions de vie des chiens, et la façon dont ils sont entraînés comporte aussi son pesant de cruauté et de maltraitance. Car pour ces chasseurs-là, les chiens ne sont qu'un simple outil leur servant à chasser, un peu comme un fusil ou une paire de bottes. Leurs animaux vivent donc dans des conditions de vie insalubres, sont fréquemment maltraités, et dressés selon des méthodes barbares.

Attachés à l'arrière d'une voiture à 60 km/h

 Ainsi, afin de les entraîner à courir plus vite, certains galgueros attachent les chiens avec une corde accrochée à l'arrière d'une voiture, roulant à une soixantaine de kilomètres par heure, pour forcer les chiens à se dépasser et à être plus endurants. Lors de ces séances de sprint motorisé, il arrive que les animaux, essoufflés, ne soient pas en mesure de tenir la cadence imposée par le véhicule, et se fassent traîner au sol sur plusieurs mètres

Lorsque les galgos ne sont plus assez efficaces, ils les abandonnent ou les tuent sans état d'âme... souvent en les torturant, de manière à faire durer leur agonie le plus longtemps possible.

Tortures, écorchages à vif, pendaisons : une façon de punir les chiens ayant « déshonoré » leur maître.

Pourquoi, dans quel but des chasseurs s'adonnent-ils à ces actes barbares et cruels ? Un chasseur n'est-il pas supposé aimer plus que tout son chien, fidèle compagnon d'aventure ?

La première raison d'être de la mise à mort des chiens résulte d'un pur souci de pragmatisme : les éleveurs cherchent à faire se reproduire les animaux pour obtenir le plus de chiots possible, afin de ne sélectionner à terme que les meilleurs galgos. Ils doivent donc, logiquement, se débarrasser des autres. Les « mauvais chasseurs », les jeunes chiens jugés les moins prometteurs, se voient donc d'office supprimés par ce processus de sélection.

« Les éleveurs de lévriers les font se reproduire sans aucun contrôle pour avoir un champion », dénonce ainsi Teresa Regojo, de l'association «Lévriers en famille» à Malaga.

De plus, au bout de quelques années, les performances des chiens finissent par baisser, et ils rapportent de moins en moins de gibier. Dans ce cas-là, certains éleveurs n'hésitent pas non plus à les tuer ou à les abandonner, ce qui ne leur laisse au final que quelques années d'espérance de vie. À titre indicatif, les performances du lévrier commencent à décliner après l'âge de... trois ans. Une vie qui, bien que courte, peut tout de même être abrégée encore plus — si le chien a eu le malheur de «déshonorer » son propriétaire.

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Car il existe une autre raison qui pousse les galgueros à mettre à mort les animaux de la manière la plus douloureuse possible, en les pendant, en les lacérant, en les démembrant ou encore en les traînant derrière des véhicules lancés à pleine vitesse, pour les punir. Sur son site, l'association  Galgos France explique les raisons de cette « torture rituelle » pratiquée par les chasseurs :

«La maltraitance qui accompagne les abandons est liée à l’orgueil, car un chien qui a mal chassé déshonore son propriétaire, et cet affront doit être lavé par le sang, d’où une mort lente et dans la souffrance... »

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30 millions d'amis

La tradition prend en effet en compte l'« honneur » du chasseur. Et oui, il ne suffit pas de ramener du gibier, l'art et la manière de chasser étant codifié par des règles bien spécifiques ! Ainsi, un chien ayant remporté une victoire «sale » contre sa proie, c’est-à-dire en rusant, en empruntant des virages ou des raccourcis pour se faciliter la tâche, couvre de honte son propriétaire, et ce dernier doit « laver cet affront » par le sang.

Le chien, qui croyait en plus probablement avoir bien fait, est alors sacrifié de la manière la plus barbare. Le plus souvent, traditionnellement, il est tué par pendaison lente, selon la méthode du pianiste et les pattes arrière au sol afin que son agonie dure longtemps. Il peut être également brûlé vif, mutilé, abandonné dans la forêt les pattes brisées, jeté au fond d'un puits, et pire encore. 

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Résultat des courses  : à la fin de chaque saison de chasse en Espagne, ce sont plusieurs milliers de ces doux et magnifiques chiens qui sont retrouvés gravement blessés, morts ou agonisant. 

Même s'il est très difficile de quantifier exactement le nombre de chiens tués,depuis quelques années il semble y avoir un peu moins de pendaisons sauvages de chiens.

Cependant, cela pourrait être simplement une pratique abandonnée au profit de méthodes d'exécution plus cachées, qui permettent une meilleure impunité à leurs auteurs. Selon Teresa Regojo, «Il y a de moins en moins de pendaisons... mais on continue à tuer chiots et chiens, en les jetant dans des puits parce que cela ne se voit pas, ou en leur cassant les pattes pour qu'ils ne reviennent pas».

Le chemin de croix des associations et les difficultés de l'adoption

Si le problème est relativement méconnu à l'étranger, en Espagne, bon nombre d'associations de protection animale luttent pour sensibiliser le public au sort des Galgos.

Les plus chanceux sont recueillis par les refuges, qui doivent faire face à un afflux massif de chiens,et qui ont bien du mal à trouver les financements pour tous les soigner convenablement.

Les autres peuvent être récupérés par la police en tant que chiens errants, et placés dans des fourrières , où ils seront gazés au bout de 14 jours si leur propriétaire ne se manifeste pas pour les récupérer (autant dire qu'il y a peu de chances).

Galgos France

Difficile aussi pour les associations de trouver du soutien chez la classe politique : en Espagne, rapporte Le Monde, même le roi n'hésite pas à s'afficher en tenue de chasse, et la moitié des députés partageraient cet amour pour la chasse. Et même si la maltraitance animale est punie dans le code pénal espagnol, il semblerait que les galgueros qui s'adonnent à ce genre de pratique soient frappés par une sorte d'impunité en la matière...

C'est donc le monde associatif qui constitue le principal rempart de défense pour ces animaux. Problème : il reste très dur pour les associations espagnoles de faire adopter ces chiens par des particuliers. Les lévriers galgos ne sont en effet pas considérés comme des chiens de compagnie, et beaucoup d'Espagnols trouvent bizarre l'idée d'avoir l'un de ces chiens coureurs dans son salon, dormant dans un panier. Alors, beaucoup d'entre eux sont adoptés à l'étranger.

La Nouvelle République

Plusieurs associations françaises, mais aussi belges, britanniques ou allemandes, aident ainsi  à l'adoption des rescapés et essayent de leur trouver un foyer ailleurs, afin qu'ils puissent oublier leur triste calvaire et couler paisiblement le reste de leurs jours.

Chaque année, la Fondation Brigitte-Bardot déclare dépenser plusieurs milliers d'euros en frais vétérinaires pour soigner les animaux blessés. Toujours en France, une association spécialisée, Lévriers sans frontières, recherche des familles d'acceuil potentielle en vue d'effectuer des adoptions, et milite pour porter secours aux lévriers galgos. Et sur Facebook, le groupe " Chien Galgo à Adopter " tente également de mettre en lien les personnes intéressées par l'adoption d'un de ces magnifiques animaux.

Si la torture et la mutilation de ces chiens vous révoltent et que vous cherchez un chien à adopter, pensez aux lévriers galgos. N'hésitez pas à soutenir ces associations en leur faisant un don, à signer la pétition sur le site CHANGE.ORG...

Et surtout, partagez cet article massivement afin de toucher le plus de monde possible.


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Journaliste