Il y a deux ans, le lion Cecil était tué dans le parc national Hwange dans le Zimbabwe, par Walter Palmer, un riche dentiste originaire du Minnesota (États-Unis). La nouvelle de la mort de ce grand lion à la crinière noire, véritable icône du parc, avait ému le monde entier et provoqué un déferlement de colère international, réseaux sociaux aidant — beaucoup considéreront plus tard que la mort de Cecil a entraîné la plus grosse réaction jamais provoquée par une histoire relative à la conservation animale.
Les conséquences furent multiples : Walter Palmer fut forcé de se cacher et de fermer son cabinet pendant plusieurs mois, à cause des nombreuses protestations et d'un déferlement d'avis clients négatifs sur son établissement. Le monde a découvert une pratique auparavant méconnue, qui consiste à attirer les lions hors des parcs protégés à l'aide d'appâts afin de pouvoir les tuer.
Certaines nations, dont la France, ont décidé d'interdire de rapporter les trophées de chasse sur leur territoire, et 40 compagnies aériennes ont également fait le choix d'interdire ce genre de « bagages » à bord de leurs appareils.
La mort de Cecil aurait-elle eu au moins le mérite de faire bouger les choses en la faveurs de la protection des grands fauves ? Pas tout à fait, apparemment.
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Plus de deux ans après la mort de Cecil, l'un de ses fils vient lui aussi d'être tué lors d'une chasse aux trophées légale. L'animal, âgé de six ans, a été abattu non loin de l'endroit où son illustre père avait été lui-même tué.
Selon Andrew Loveridge, zoologue de l'Université d'Oxford, Xanda portait un collier électronique au moment même de sa mort, l'appareil permettant aux chercheurs de suivre ses mouvements. « C'est moi qui lui ai mis [le collier], en octobre dernier », se souvient le scientifique, interrogé par le quotidien britannique The Telegraph. « Ses déplacements étaient suivis quasi quotidiennement, et nous savions que Xanda et son groupe passaient beaucoup de temps hors de la zone protégée du parc au cours des six derniers mois... mais il n'y a pas grand-chose que nous pouvions faire. »
Le chasseur Richard Cooke ne se serait aperçu qu'après avoir tué l'animal que son « trophée » portait un collier électronique, et l'a rapporté aux chercheurs. Comme le lion avait six ans révolus (l'âge minimum pour pouvoir tuer un lion dans le pays) et qu'il se trouvait juste en dehors de la zone protégée du parc, le fait de le tuer était considéré comme légal.
La mort de Xanda ravive le débat sur la légitimité et l'utilité de la chasse aux trophées en Afrique. Pour les défenseurs de cette pratique controversée, les chasseurs participent à la préservation et aux programmes de sauvegarde de ces animaux sauvages, car ils doivent s'acquitter de sommes d'argent conséquentes pour avoir le droit de rapporter leurs trophées, une participation financière qui bénéficie aux parcs et aux programmes scientifiques.
Le sacrifice d'un individu, de temps en temps, pour aider la sauvegarde de toute une espèce... L'argument pourrait se tenir, d'un point de vue purement pragmatique. Cependant, il est loin de faire l'unanimité : les détracteurs de ce système avancent que la valeur d'un lion tué est, de toute manière, beaucoup moindre que le bénéfice à long terme apporté par un animal vivant à l'économie locale et nationale, grâce au tourisme notamment.
Walter Palmer, lui, avait dû s'acquitter de 54 000 dollars américains pour tuer Cecil.