Black Mirror, la brillante série de Charlie Brooker, bientôt de retour pour une cinquième saison sur Netflix

Bouton whatsapp

Il n’aura pas fallu plus d’un épisode à Black Mirror en 2011 pour s’imposer comme l’une des séries les plus intelligentes et dérangeantes de ces dernières années. Perçue comme visionnaire, mais plutôt miroir grossissant de ce qui est déjà en train de se passer, la série, au départ très british, a connu un succès retentissant auprès du grand public lors de son rachat par Netflix, qui a d’ailleurs produit les saisons 3 et 4. Et qui produira également une cinquième saison prochainement.



S’il existe bien une série d’utilité publique, nul doute qu’il s’agit Black Mirror. Créée par le journaliste anglais Charlie Brooker, cette série anthologique, c'est-à-dire dont chaque épisode est indépendant des autres, est aussi brillante dans son écriture et sa réalisation qu’elle est dérangeante. Si nous pouvons entendre souvent dire que le monde de Black Mirror est le monde de demain, il est plus qu’évident qu’il n’est qu’une version exacerbée de notre monde actuel, destiné à nous faire prendre conscience non pas des dangers intrinsèques de la technologie, mais bien de la façon dont les comportements humains les plus vils tendent à se développer au contact de celle-ci.

Vous avez peut-être été choqué par le système de notation des êtres humains mis en exergue par l’épisode Nosedive de la saison 3 et espérez qu’il ne soit jamais mis en place. Si vous observez attentivement autour de vous, que vous réfléchissez aux applications que vous utilisez, à leur fonctionnement, vous comprenez bien rapidement que ce système est déjà là, de façon plus subtile et discrète toutefois que dans la série, qui vous balance à la face cette réalité exacerbée comme un violent direct en pleine mâchoire visant à vous faire décrocher.

Jon Hamm dans l'épisode spécial Noël de la saison 2 de Black MirrorBlack Mirror / White Christmas

Se déroulant majoritairement au Royaume-Uni, pays d’origine de la série, pendant les deux premières saisons, Black Mirror s’est quelque peu relocalisée aux Etats-Unis une fois que Netflix a pris les rênes de la production avec la troisième saison, sortie en 2016. Grâce à son succès grandissant, Black Mirror a pu s’offrir dans ses épisodes des têtes d’affiche aussi prestigieuses que Jon Hamm (mythique Don Draper de Mad Men), Bryce Dallas Howard, Jerome Flynn (Bronn de Game Of Thrones), Jesse Plemons, et même Aaron Paul, respectivement les Todd et Jesse Pinkman de la légendaire Breaking Bad. Ce dernier s’offre ainsi un discret cameo vocal dans la quatrième saison. Jodie Foster elle-même est passée derrière la caméra, le temps de réaliser un épisode.

Révélatrice de talents en plus de réalités humaines et sociales, Black Mirror l’est assurément. Pour ne citer que lui, le jeune Alex Lawther, protagoniste de l’épisode aussi inoubliable que traumatisant Shut Up And Dance, est par la suite devenu la star d’une autre série Netflix, véritable succès public et critique, The End Of The F***ing World. Daniel Kaluuya, fantastique dans Get Out pour lequel il a été nommé aux Oscars, s'était également illustré dans le deuxième épisode de la première saison de Black Mirror, déchirant. 

Jerome Flynn, le Bronn de Game Of Thrones, et Alex Lawther de The End Of The F***ing World réunis dans la troisième saison de Black Mirror, à l'occasion de l'un des épisodes les plus opressants. Black Mirror / Shut Up and Dance

Si quelques-uns ont pu déplorer dernièrement le côté peut-être plus spectaculaire, davantage tire-larme facile et un poil moins imaginatif de Black Mirror, mis sur le compte de Netflix et ses moyens débordants à partir de la troisième saison, nous ne pouvons néanmoins que saluer le brio de cette série à valeur éducative et sociétale que chacun d’entre nous se doit de regarder pour réaliser à quel point les relations humaines évoluent rapidement avec ces technologies que nous ne savons pas encore maîtriser, prendre conscience du point auquel nous adaptons nos comportements à celles-ci extrêmement rapidement, et surtout prendre de la distance pour mieux nous retrouver et ne pas nous laisser happer.

Black Mirror est résolument une série qui se doit d’être regardée, digérée, et assimilée, conciliant intelligence, finesse du propos et divertissement de qualité élevant la pensée. Il s’agit d’une œuvre qui parle à tout le monde, et dont tout le monde peut – et doit — parler. Une œuvre qui ouvre nos yeux parfois trop fermés.

Certains souriront peut-être en appréciant le paradoxe induit par la série. Ce black mirror, ce miroir noir, renvoyant aux écrans de nos appareils constitue l’exact filtre par lequel nous devons passer pour regarder les épisodes, qui pourtant critiquent la relation nocive que nous entretenons avec eux. Et pourtant, ce moyen est plus efficace pour partager et transmettre la théorie des médias à l’ensemble de la population que n’importe quel ouvrage universitaire, pouvant paraître parfois inaccessible.

Difficile de parler de dystopie tant le monde de Black Mirror se veut dans certains épisodes le reflet du nôtre, ici en illustrant par exemple la volonté de chacun de devenir une star en passant par la caricature des émissions comme The Voice. Black Mirror / 15 Million Merits
Si nous ne savons pas encore quand cette cinquième saison débarquera sur nos écrans, ni combien d’épisodes celle-ci comptera, il n’est pas risqué de se hasarder à tabler sur la fin d’année 2018 / le début de l’année 2019, et à escompter un total de six épisodes, à l’instar des deux précédentes saisons produites par Netflix.

D’ici-là, vous avez tout le temps de voir ou revoir l’intégralité de la série, rappelant tantôt dans sa logique La Quatrième Dimension, tantôt Le Prisonnier, et de découvrir d’autres raisons de la regarder ici même.


Au sujet de l'auteur : Hugo Nikolov

Journaliste