Pologne : Les conservateurs ont été obligés de retirer en catastrophe leur projet de loi qui punit de 5 ans de prison les femmes qui veulent se faire avorter... Même lorsqu'elles sont victimes de viol

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Aujourd’hui, 6 octobre, le parlement Polonais a finalement rejeté une proposition de loi visant à interdire totalement l’avortement aux femmes. L’annonce du projet de loi avait généré une énorme vague de protestations, avec des « marches noires » au cours desquelles près de 100 000 femmes vêtues de noir ont défilé dans la rue pour défendre leurs droits.

L’ampleur du mouvement de ces femmes indignées face à ce véritable retour en arrière a terrifié le gouvernement, qui a été obligé de se rétracter en catastrophe.


Manifestaiton du "Lundi Noir" sur la place Wroclaw  Photographie: Maciej Kulczyński/EP



Après des protestations massives, face à la colère de la rue, les dirigeants du PiS (Droit et Justice) ont été contraints de faire machine arrière sur un projet de loi visant à faire interdire totalement l’avortement. Ce parti nationaliste et conservateur est au pouvoir depuis 2015, avec l’élection de Andrzej Duda à la présidence de la République.

La Gazeta Wyborcza, un journal local de ligne éditoriale progressiste, a relaté des scènes d’apocalypse au sein du parlement Polonais mercredi soir, avec « des cris et un incroyable chaos » lorsque certains membres du parti conservateur, craignant le retour de flamme, ont suggéré de faire machine arrière et de rejeter le projet de loi. Les pro-avortement, eux, se sont vus refuser l’accès à la chambre du comité.


5 ans de prison pour un avortement


Selon Ewa Kopacz, ancienne Première Ministre libérale, les membres du parti « Droit et Justice » ont été « obligés de se rétracter parce qu’ils ont eu peur de toutes ces femmes indignées qui ont envahi les rues en protestation de leur loi ». Des dizaines de milliers de personnes ont fait grève ce lundi, désertant les classes et les lieux de travail, conduisant les conservateurs à remettre en question la légitimité de leur loi. Un échec humiliant pour ce parti qui souhaitait interdire catégoriquement toute forme d’interruption volontaire de grossesse, même pour les victimes de viol ou d’inceste !

Près de 30 000 personnes habillées de noir se sont regroupées malgré le mauvais temps, brandissant des cintres pour évoquer l’avortement clandestin, et clamant des slogans tel que « Nous voulons des docteurs, pas des missionnaires ! »

Dans le projet initial, l’avortement d’une femme pouvait en effet être puni de 5 ans d’emprisonnement… Même si l’enfant a une malformation grave, que la vie de la mère est en danger, ou bien qu’elle a été violée.
DR



Les « manifestations noires » ont été extrêmement suivies et ont fédéré beaucoup plus de personnes que ce qui était espéré au départ par les militants, de l’aveu même des organisateurs.

Il semblerait en outre que cette tentative de loi scandaleuse par le parti conservateur ait eu l’effet inverse que celui qui était espéré, et que cela ait fait changer et évoluer l’opinion publique par rapport à cette problématique !


Une "leçon d'humilité" pour le Gouvernement


De récents sondages suggèrent en effet que non seulement il y a eu une opposition quasi-unanime des Polonais face à cette loi, mais également qu’ils soutiennent de plus en plus le progressisme et l'assouplissement des lois déjà existantes sur l'avortement.

De même, le soutien du peuple Polonais pour le gouvernement est tombé en flèche, avec une cote de popularité au plus bas depuis les dernières élections.

 Selon des propos rapportés par le journal Le Monde, le ministre de la science et de l’enseignement supérieur, Jaroslaw Gowina, explique que manifestation de lundi a « fait réfléchir » la majorité et lui a donné « une leçon d’humilité ». 
© Janek Skarzynski, AFP

En Pologne, à l’heure actuelle, l’avortement est toujours illégal, sauf dans le cas d’un viol, d’un danger pour la santé de la mère ou de l’enfant, d’une malformation grave ou autre. En pratique, cependant, de nombreux docteurs refusent de réaliser des avortements même lorsqu’ils sont « légaux », en invoquant leur droit d’objection morale. Les femmes Polonaises ayant besoin de réaliser une IVG sont souvent obligées d’aller en Allemagne, ou encore d’acheter des pilules sur internet.

La mobilisation de nombreuses et nombreux Polonais(e)s pourrait bien avoir l’effet inverse de la loi qui visait à durcir la répression, et d’utiliser ce mouvement pour tenter de donner plus de droits aux femmes désireuses de réaliser une Interruption Volontaire de Grossesse.




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Au sujet de l'auteur : Nathan Weber

Journaliste