Glyphosate : le gouvernement revient sur l'interdiction du pesticide

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Le 5 ou le 6 octobre prochain devrait avoir lieu un vote au sein d'un comité d'experts Européens, concernant la réautorisation, ou non, du glyphosate, herbicide présent notamment dans le Roundup (mai pas que lui). À cette occasion, l'Europe devra se prononcer sur la prolongation de l'autorisation de cette molécule, dont l’homologation expire d’ici à la fin de 2017, pour dix années supplémentaires.

Si la Commission européenne propose de prolonger cette autorisation pour dix ans, la France votera contre, a fait savoir le ministère de la transition écologique le 30 août. Si le glyphosate est l'herbicide le plus répandu à l'heure actuelle en Union européenne, il est aussi très controversé. Or, la France a une position clé dans le débat, car une majorité qualifiée est requise.

Le désherbant Roundup, dont le principal ingrédient est le glyphosate /Shutterstock

L'interdiction de l'utilisation du glyphosate par les collectivités dans les espaces ouverts au public est déjà effective depuis janvier 2017, et son emploi par les particuliers sera interdit à partir de 2019.

Le refus de la prolongation de l'autorisation du glyphosate chez les professionnels de la production agricole avait été réclamé par une initiative citoyenne européenne (ICE), lancée par une quarantaine d’associations après avoir recueilli 1 323 400 signatures sur le territoire de l’Union.

De leur côté, des représentants des professionnels du secteur agricole affiliés à la FNSEA ont manifesté vendredi dernier sur les Champs-Élysées, protestant vivement contre l'interdiction du glyphosate qui, arguent-ils, menace leur activité. Sans proposition en contrepartie pour remplacer ce produit, leur mode de production, qui en est dépendant, risque de s'effondrer. Aujourd'hui, la France pourrait revenir sur cette décision

Épandage manuel de pesticides /Shutterstock

Qu'est-ce que le glyphosate ?

En soi, le glyphosate permet d'éviter d'avoir à labourer la terre pour arracher les mauvaises herbes. Il permet de nettoyer rapidement une parcelle entre deux semis, et évite ainsi l'emploi répété de machines agricoles coûteuses et polluantes, qui contribuent à l'érosion des sols. Le revers de la médaille, c'est que ce produit est toxique pour certains organismes aquatiques, et que certaines plantes peuvent développer une résistance (c'est aussi le cas pour un bon nombre d'autres herbicides).

Cependant, un nouveau problème se pose depuis quelque temps : le glyphosate a été reconnu comme étant « un cancérigène probable » pour l'humain selon un rapport du Centre International de recherches contre le cancer (CIRC) de l'OMS, datant de 2015.

Si les risques de toxicité pour l'homme sont encore sujets à caution et que d'autres études sont allées depuis à l'encontre des premiers résultats obtenus par le CIRC, une étude publiée le 14 septembre par l'ONG Générations futures achève de semer le trouble : sur une trentaine d'aliments de consommation courante analysés, plus de la moitié des produits analysés contiennent du glyphosate.

Pour l'instant, ce n'est donc pas tant l'impact environnemental qui inquiète le plus, c'est surtout le fait que ce produit puisse être aussi largement présent dans notre alimentation, et à l'insu du consommateur.

Des champs traités à l'herbicide avant une plantation / Shutterstock

À côté de ça, certains agriculteurs, employant les techniques de culture et de production dites « conventionnelles », protestent vivement contre l'interdiction du glyphosate.

En effet, tout leur modèle de production et le fonctionnement de leurs exploitations reposent en partie sur l'utilisation de ce produit. Outre le fait que la molécule évite d'avoir à employer des techniques de labour répétitives, impliquant le passage de nombreux engins agricoles (ce qui aurait aussi un impact significatif sur l'environnement), l'utilisation d'un herbicide universel leur permet d'économiser une charge de travail importante, ainsi que des coûts très lourds qui pourraient mettre en péril leur activité.

250 d'entre eux (pour la plupart des céréaliers) sont venus protester vendredi dernier, bloquant l'avenue des Champs-Elysées. Le ministre de la transition écologique Nicolas Hulot est allé à leur rencontre afin d'entendre leurs doléances. C'est en effet le ministère de l'ex-présentateur d'Ushuaïa qui avait annoncé, le 30 août dernier, que la France voterait contre le renouvellement de la licence du glyphosate.

Le souci, essentiellement, c'est que les agriculteurs n'ont pas vraiment d'autre alternative pour continuer à produire autant. Il existe bien un autre produit sur le marché qui pourrait se substituer au glyphosate, le glufosinate-ammonium… Mais comme le précise Christian Huyghe, directeur scientifique adjoint de l'INRA au Monde, « si son efficacité est équivalente à celle du glyphosate, son impact sur l’environnement l’est aussi. » Remplacer un mal par un autre ne réglerait pas vraiment le problème…

Nicolas Hulot/Shutterstock

À présent, l'indécision et la plus grande confusion semblent régner à Matignon. Christophe Castaner, porte-parole du gouvernement, avait annoncé hier que le glyphosate serait « interdit en France d’ici à la fin du quinquennat ». Quelques heures plus tard, il revenait déjà sur ses propos, affirmant que le gouvernement « s’engage à obtenir des progrès significatifs pour tous les pesticides », sous-entendant que le gouvernement avait pour objectif premier de trouver des produits de substitution efficaces.

La Fédération nationale des syndicats d’exploitants agricoles (FNSEA) a elle aussi accentué la pression sur le gouvernement : « Il est hors de question que si l’Europe dit oui, la France dise non ! Pas de distorsion, a dit M. Macron, nous saurons lui rappeler », a déclaré à la presse Christiane Lambert, dirigeante du syndicat agricole, à la sortie de l'entretien avec Nicolas Hulot.


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Au sujet de l'auteur : Nathan Weber

Journaliste