À Marseille, Vinci va finalement pouvoir construire une résidence de luxe de huit étages sur un site archéologique datant de la fondation de la cité phocéenne

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Il y a plus de deux millénaires, aux alentours de l'an 600 av. J.-C., des marins grecs originaires de la ville de Phocée accostent sur ce qui deviendra, bien des années plus tard, le Vieux Port de Marseille. Bientôt, ils posent les premières pierres de Massalia : la toute première cité de Méditerranée occidentale, et la plus ancienne ville de France, ce n'est tout de même pas rien ! Le passé extrêmement riche de la ville, qui puise ses origines dans le mélange des apports de nombreux peuples méditerranéens au fil des âges, fait aujourd'hui encore la fierté des Marseillais, qui ne s'y trompent pas.

Mais cette histoire, ce passé unique et glorieux sont aujourd'hui menacés par le rugissement des pelleteuses et le vrombissement des bétonnières…

Guy Coja

Une tour de huit étages et un parking à la place du « berceau de Marseille »

Dans le boulevard de la Corderie (7e arrondissement), se trouvent les ruines d'une carrière de calcaire datant du Ve siècle av. J.-C., la plus ancienne connue à ce jour. C'est de cet endroit que furent extraites les premières pierres qui servirent aux Grecs phocéens à édifier la ville, ville qui devint rapidement une cité commerçante prospère, avant de finalement devenir au fil des siècles la Marseille qu'on connaît aujourd'hui.

Ces ruines, comblées dans le premier quart du Vsiècle, ont été redécouvertes il y a peu de temps, en 2016, lors d'un chantier de grande envergure porté par Vinci Immobilier, pour construire un complexe de résidence de haut standing. Les fouilles menées au préalable par l’institut national de recherches archéologiques préventives (INRAP) avaient révélé la présence de la carrière, ce qui avait eu pour incidence de geler temporairement le projet, et qui logiquement aurait dû mettre fin aux travaux, en vertu de la protection du patrimoine.

Malheureusement, en dépit de l'intérêt scientifique, historique et touristique certain d'un tel site, la mairie souhaite finalement donner son feu vert et permettre à Vinci de reprendre les travaux.

via Reporterre

Vers une nouvelle " Zone À Défendre " ?

« C’est la seule carrière aussi ancienne que l’on connaisse ici. Marseille, ce n’est pas n’importe quoi : c’est 2 600 ans d’histoire urbaine en continu », explique Jean-Paul Demoule, archéologue et ancien président de l’INRAP, au site Reporterre. « La carrière a servi pour construire des sarcophages, des petites statues. L’étude de ce site permettra de retracer les méthodes d’extraction »

Or, ce lundi, la ministre de la Culture Françoise Nyssen a décidé de ne pas étendre le périmètre classé de ce site antique. Sur les 6 500 m², seuls 650 m² seront classés monument historique. La majeure partie de la zone archéologique pourra donc servir à la construction de la résidence de huit étages pour 109 logements « haut de gamme » prévue par Vinci.

Cette annonce a ravivé la colère des opposants au projet, qui n'hésitent pas à qualifier le site de « berceau » de la ville, puisque l'ancienne carrière offre un témoignage unique de la manière dont la ville a été fondée par les Grecs phocéens.

Nombreuses personnes présentes hier soir pour dire NON à la destruction des vestiges de la Corderie ! Restons TOUS mobilisés ! Ne lâchons rien

Publié par Collectif " Laisse Béton " sur jeudi 7 septembre 2017

Hier, jeudi 7 septembre, le comité d’intérêt de quartier (CIQ) de Saint Victor a déposé devant le tribunal administratif un recours en annulation de la décision préfectorale libérant le terrain au promoteur.

Si le bras de fer a été lancé au niveau juridique, le destin de la carrière de la Corderia se jouera également dans la rue. Plusieurs associations marseillaises, dont le CIQ mais également le collectif « Laisse béton » appellent déjà à occuper les lieux. Certaines personnalités politiques, dont le député marseillais Jean-Luc Mélenchon, sont également de la partie.

Une pétition, diffusée sur internet, a déjà recueilli plus de 13 000 signatures


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Au sujet de l'auteur : Nathan Weber

Journaliste