Médine en concert au Bataclan, quand l'extrême-droite et la droite récupèrent les attentats du 13 novembre pour prôner la censure

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Les représentants de droite et d'extrême-droite s'offusquent de la venue du rappeur Médine au Bataclan à cause de certaines paroles jugées controversées. Il doit normalement donner deux concerts les 19 et 20 octobre prochain.

La twittosphère est sens dessus dessous. Depuis samedi, le hashtag #MedineAuBataclanCestNon est le théâtre d'un débat entre les fans de rap et représentants de la droite et d'extrême droite. Le rappeur Médine doit se produire dans la salle mythique du Bataclan les 19 et 20 octobre 2018. Une salle mythique mais tristement célèbre depuis la nuit du 13 Novembre 2015 où un commando de l'Etat Islamique avait pénétré l'enceinte tuant 90 personnes.

On reproche à Médine des propos tendancieux comme dans son titre « Don't Laïk »,sorti en 2015, extrait de l'album Demineur où le rappeur somme un « Crucifions les laïcards comme à Golgotha » faisant référence à la crucifixion de Jésus sur le Mont Calvaire plus communément appelé Golgotha.


Pourtant, le rappeur a de nombreuses fois expliqué cette phrase comme dans l'emission Arrêt sur images en janvier 2016 : « Crucifions les laïcards comme à Golgotha, c’est clairement un oxymore, dans ce qui est proposé comme image. On ne crucifiait pas les laïcards à Golgotha. Et d’ailleurs, il ne s’agit pas de crucifier à proprement dit les laïcards. Il y a un déroulé d’absurdités, d’oxymores jusqu’à la fin du morceau, qui amène vers l’exorcisme de la laïcité. Et c’est ça qui est le plus important. Parce qu’à la fin, je rappelle que la laïcité est possédée par un certain nombre de gargouilles de la République ».


La phrase en question a été reprise par de nombreux représentants du Rassemblement national (RN), comme la présidente du mouvement, Marine Le Pen : « Aucun Français ne peut accepter que ce type aille déverser ses saloperies sur le lieu même du carnage du Bataclan. La complaisance ou pire, l'incitation au fondamentalisme islamiste, ça suffit ! » Avec un #PasDeMédineAuBataclan pour ponctuer son tweet.


En 2005, le Havrais sortait son deuxième album intitulé « Jihad, le plus grand combat est contre soi-même », une aubaine pour les membres des partis de droite et d'extrême-droite. Rappelons-le dans la religion musulmane le terme Jihad désigne une abnégation, un effort, une lutte aussi bien spirituelle que sociale, qui, hélas, est souvent confondue avec la « guerre sainte » : « J’ai intitulé mon album Jihad, d’abord avec un sous-titre 'Le plus grand combat est contre soi-même',[…] Mon message à ce moment-là s’adressait à ceux qui seraient tentés de partir combattre et à ceux qui ont une définition de ce terme complètement galvaudé » avait expliqué Médine.

Dans une lettre publiée sur le FigaroVox, les avocats Caroline Wassermann et Bernard Benaïem, défenseurs de plusieurs familles de victimes du Bataclan, réclament l'annulation des concerts.

Enfin une pétition a été lancée sur le site Change.org pour interdire les deux représentations du rappeur.

Médine et le Bataclan

Comme expliqué précedement, Médine a de nombreuses fois expliqué ses vers aux médias. Pour « Don't Laïk », il avait expliqué être allé trop loin : « La provocation n'a d'utilité que quand elle suscite un débat, pas quand elle déclenche un rideau de fer. Avec Don't Laïk, c'était inaudible, et le clip a accentué la polémique. »


La salle du bataclan est un « rêve » pour le rappeur. En mars dernier, entouré d'Orelsan et de Youssoupha, il avait lancé un vibrant hommage au Bataclan en saluant la programmation Hip-Hop du lieu depuis plusieurs années.


L'association des vitimes du Bataclan « Life for Paris » s'est exprimée sur cette récupération politique du concert de Médine. Ils expliquent que la salle de concert est libre de sa programmation et que personne ne doit pas « instrumentaliser la mémoire des victimes des attentats à des fins politiciennes ».


Médine est connu pour ses couplets forts et puissants, depuis ses débuts où les « punchlines » fusent créant souvent la polémique mais aussi amènent à la réflexion sur la société française. À l'heure où le trentenaire va enfin réaliser « son rêve », comme il l'explique dans le titre Bataclan, la polémique enfle remettant en cause sa légitimité d'artiste pouvant se produire dans une telle salle.

Au regard de la polémique suscitée, le rappeur a tenu lui-même à se défendre au travers d'une publication sur sa page Facebook dans laquelle il explique notamment qu'il combat toute forme de radicalisme depuis le début de sa carrière : 

Pour toutes les personnes voulant comprendre le texte "Don't Laïk" de Médine, n'hésitez pas à faire un tour sur Genius.com


Au sujet de l'auteur : Aurélien R.

Journaliste