Dans les décombres d’Alep, alors que la guerre est loin d’être terminée, Mohammad Alaa Jaleel reste coûte que coûte afin de s’occuper des chats errants.
Même dans le cadre d’une guerre insoutenable et qui semble interminable, il y a au moins une belle histoire à raconter. Celle de Mohammad Alaa Jaleel, un habitant d’Alep qui, malgré la situation, s’est donné pour mission de continuer à vivre avec le cœur sur la main.
Depuis 2012, la ville d’Alep, la seconde la plus importante de Syrie, est devenue un champ de ruines. Sa situation géographique en a fait un point stratégique dans le conflit qui met aux prises l’armée loyaliste, fidèle au régime de Bachar el-Assad, et l’armée des rebelles, sans parler des djihadistes de l’État Islamique qui sont venus mettre leur grain de sel.
Résultat, l’une des plus anciennes cités du monde (habitée depuis 5 000 avant J.-C.), qui brillait par son cosmopolitisme, son dynamisme industriel et culturel, n’est plus qu’un champ de ruines. Habitée par 2,9 millions d’habitants avant la guerre, Alep est désormais un champ de ruines, divisée en deux camps qui ne comptent pas lâcher prise.
Hélas, entre les deux camps, il existe des habitants innocents qui n’avaient rien demandé à personne. Des dizaines de milliers de résidents ont fui la ville, optant pour la migration vers un avenir meilleur dans un pays paisible, quand d’autres ont trouvé la mort sans l’avoir cherché.
Au milieu des décombres, Mohammad Alaa Jaleel a donc créé un sanctuaire à ciel ouvert dans lequel il prend soin des chats qu’il récupère, où qui viennent naturellement jusqu’à lui. « L’homme-chat d’Alep », comme on le surnomme aujourd’hui, est devenu le sujet d’un reportage de la BBC : « Certaines personnes ont justement laissé leurs animaux avec moi, parce qu’elles savent que j’aime les chats. Tous les chats errants d’Alep, ainsi que les chats abandonnés par leurs maîtres, sont accueillis, dans notre petit sanctuaire ».
Le sanctuaire, créé en 2011 avant que le conflit ne vienne détruire la ville d’Alep, accueillait une vingtaine de félins. Un an plus tard, Mohammad Alaa Jaleel avait plus de 100 chats sous sa responsabilité.
Il raconte alors une anecdote concernant une petite fille qui a fui en Turquie avec sa famille, et qui lui a laissé son chat : « Un jour, une petite fille m’a apporté un chat. Ses parents voulaient partir à l’étranger. Ainsi, ils sont venus ici, parce qu’ils savaient qu’il y avait un sanctuaire pour les chats ici. La fille a apporté le chat alors qu’il n’était qu’un chaton. Elle pleurait quand elle me l’a donné, puis est partie. Je fais des photos de son chat et je les lui envoie. Je lui ai promis de lui rendre quand elle reviendrait. »
D’autres habitants, notamment des enfants, sont là pour lui donner un coup de main, mais Mohammad Alaa Jaleel veut dédier sa vie à ces animaux, alors que tous ses amis sont partis : « Depuis que tout le monde a quitté le pays, y compris mes amis, ces chats sont les seuls amis qui me restent. Je resterais avec eux quoiqu’il arrive » conclut-il. Un homme d’une générosité incroyable qui nous rappelle l'histoire de cet imam à Istanbul qui recueille les chats dans sa mosquée pendant l'hiver.
L’homme est devenu, sur les réseaux sociaux, un héros de l’ombre qui mériterait plus de reconnaissance. D’ailleurs, un groupe Facebook baptisé « Nobel Peace Prize to Alaa » (Prix Nobel de la Paix pour Alaa, ndlr) a même été créé.
Incroyable histoire, n’est-ce pas ?