Ce mardi 10 octobre, à 19h, le président catalan Carles Puigdemont a prononcé, suite à un discours déterminé, l'indépendance de la Catalogne, s'engageant à appliquer les résultats du référendum qui s'était déroulé «sous une pluie de matraques» de la police espagnole, le 1er octobre dernier. Avant de la suspendre...
« Il y aura un avant et un après 1er octobre», le style de phrases qui annonce clairement qu'un tournant de l'histoire espagnole est en train de s'écrire, à l'heure où le président catalan confirme la volonté de sa région à s'émanciper sur le plan politique. En effet, il y a 10 jours de cela, le gouvernement espagnol a envoyé ses forces de l'ordre pour réprimer le référendum, qu'il considérait illicite, quitte à taper sur les électeurs, même dans les bureaux de vote.
Une journée qui avait alors rompu le dialogue entre la région catalane et le reste de l'Espagne. Et à Carles Puigdemont de rappeler que Carles Puidgemont ce problème n'est pas qu'espagnol : « Nous vivons un moment historique. Les conséquences dépassent largement notre pays, et il ne s'agit pas d'une simple question locale, mais d'une affaire européenne. Le moment est assez sérieux pour que nous assumions tous nos responsabilités, et tentions tous de réduire l'escalade des tensions.»
Dans son discours, le président catalan rappelle le rôle de sa région dans la reconstruction politique et l'essor économique de l'Espagne après la mort du dictateur Franco. En prenant en exemple l'Écosse, il dénonce le refus de Madrid de vouloir négocier la tenue d'un référendum, et ce depuis des décennies : « A 18 reprises, nous avons formulé la demande d'organiser un référendum sur le modèle écossais. Pourquoi cela ne pouvait pas se faire en Espagne aussi ? La réponse a toujours été négative, accompagnée, en outre, d'une riposte policière ».
Cependant, malgré cela, Carles Puidgemont tient à trouver une voie institutionnelle et en appelle aux droits démocratiques des Catalans : « Maintenant, je m'adresse à tous les Espagnols inquiets. Nous ne sommes pas des délinquants. Nous ne sommes pas des fous. Nous ne sommes pas des putschistes. Nous sommes des personnes normales qui veulent voter ».
Puis il réitère la légitimité du scrutin en déclarant ce que tout le monde attendait, la naissance d'une République catalane : « À la suite du référendum, la Catalogne a gagné le droit d'être un État indépendant. Le oui à l'indépendance a gagné sous une pluie de matraques. C'est le chemin que je vais mener ».
Après de longs applaudissements d'une partie du Parlement catalan, il déclare la suspension des effets de cette déclaration et tend la main au dialogue au gouvernement espagnol, ainsi qu'à l'Europe : « Le Parlement propose de suspendre les effets d'une déclaration d'indépendance. Le gouvernement de Catalogne tend la main au dialogue. Lors des prochains jours, si tout le monde agit avec la même responsabilité, le conflit peut se résoudre de façon sereine en respectant la volonté des citoyens »
La Catalogne deviendra-t-elle réellement indépendante ? Crédit image: Shutterstock / Riderfoot
Suite à cette annonce, les réactions n'ont pas tardé comme le gouvernement espagnol qui a déjà fait savoir qu'elle n'acceptera pas la moindre négociation pour la tenue d'un référendum, réaffirmant son pouvoir. Sur le plateau de BFM TV, l'ambassadeur espagnol qualifiait même cette déclaration de "coup d'État".
Par ailleurs, les séparatistes catalans les plus fervents ont exprimé leur déception et leur frustration du léger recul adopté par Carles Puigdemont à l'image des jeunes du CUP (Candidature d'Unité Populaire, un parti radical de gauche indépendantiste) : "Maintenant, plus que jamais, nous devons continuer à nous organiser pour exiger l'application IMMEDIATE de l'indépendance. Que la prudence de nous fasse pas devenir des traitres" peut-on lire sur un tweet :
Ara més que mai cal que continuem organitzades per exigir l'aplicació IMMEDIATA de la #independència. Que la prudència no ens faci traïdors!
— Arran #Independència (@Arran_jovent) 10 octobre 2017
Évoqués dans le discours, les pays européens se devaient aussi de réagir et l'Élysée a rapidement déclaré qu'elle ne reconnaissait pas l'indépendance de la Catalogne, apportant son soutien au gouvernement espagnol. Et il y a de forteschances que les autres membres de l'UE entonnent le refrain.