La France « interviendrait » en cas de condamnation à mort de Français ayant combattu pour Daesh

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La délicate question du sort des djihadistes français faits prisonniers en Irak et en Syrie continue à faire débat, et embarasse au plus haut point le gouvernement français. Selon le procureur de Paris François Molins, interrogé mardi sur RTL, il y aurait encore à ce jour 676 ressortissants français, dont 295 femmes, sur le théâtre des opérations. Il estime à « moins d'une centaine » le nombre total de Français détenus en Irak.

Or, la question du jugement de ces djihadistes porteurs de la nationalité française semble susciter des désaccords au sein même du gouvernement. Ainsi, la Ministre des armées Florence Parly, qui en octobre dernier , a réaffirmé lundi dernier qu'elle n'était pas spécialement disposée à s'appitoyer sur le sort des combattants français de l'EI, déclarant que « les djihadistes n’ont jamais eu d’états d’âme, je ne vois pas pourquoi nous en aurions pour eux ». La même avait déjà afffirmé en octobre que, s'il advenait que des djihadistes périssent dans les combats, ce serait « tant mieux », et qu'ils dépendront de la juridiction syrienne s'ils venaient à tomber entre les mains des forces syriennes.

Mais la Garde des Sceaux et Ministre de la justice Nicole Belloubet a fait entendre ce dimanche 28 janvier un tout autre son de cloche : interrogée par le « Grand Jury » RTL/LCI/Le Figaro, elle a assuré vouloir privilégier le fameux traitement « au cas par cas » et a déclaré que la France n'hésiterait pas à négocier avec les États détenant les prisonniers français, afin de garantir un cadre légal équitable dans les procès, et dans le cas où la peine de mort soit prononcée.

Nicole Belloubet sur le plateau du « Grand Jury », RTL/LCI/Le Figaro (Capture d'écran)

« En tant que ministre de la Justice, je suis évidemment attachée à un procès équitable. Je considère que les règles élémentaires du procès équitable doivent être mises en œuvre, a-t-elle souligné. C’est un traitement au cas par cas qui doit être effectué. […] Bien entendu, s’il y avait une question de peine de mort, l’Etat français interviendrait en négociant avec l’Etat en question. »

Rappelons que le 22 janvier, une Allemande a déjà été condamnée à la peine capitale, pour la première fois, en Irak. L'affaire, une grande première, a démontré que les autorités irakiennes n'étaient pas disposées à faire de traitement de faveur, et qu'elles n'auraient pas plus d'indulgence pour les combattants européens que pour ceux issus d'autres pays. Cela a poussé les avocats représentant les djhadistes français et leurs familles à faire pression sur le gouvernement, appelant Emmanuel Macron à « une mobilisation sans faille »

Quoi qu'il en soit, et indépendamment de la volonté de l'État Français, un autre souci d'ordre légal se posera, qui est directement lié au statut des organisations détenant à l'heure actuelle les prisonniers. En effet, lorsque l'autorité qui détient les djihadistes français représente le gouvernement d'un État souverain reconnu tel quel par la communauté internationale (comme c'est le cas en Irak par exemple), elle a tout a fait le droit de juger les prisonniers sur son sol en tant que gouvernement de l'État en question.

Pour les djihadistes détenus par les forces Kurdes ou par les combattants de l'Armée Syrienne Libre (ASL), c'est un peu plus compliqué puisque ces groupes ne sont pas reconnus comme représentant des États souverains légitimes. Cela a conduit les avocats de familles de djihadistes à déposer deux plaintes contre l'État Français pour « détention arbitraire », dénonçant le fait que le gouvernement français laisse ces autorités « non reconnues légalement » détenir et juger ces ressortissants.

« La situation est différente selon les Etats dont vous parlez, a ainsi déclaré Nicole Belloubet au micro du « Grand Jury ». Avec la Turquie, nous avons des accords qui sont clairs et qui nous permettent de faire revenir les personnes, avec l’Irak, c’est un Etat qui est reconnu comme tel et donc bien entendu les Français qui sont là-bas peuvent être jugés par l’Etat irakien. La Syrie, c’est un peu plus compliqué puisque l’Etat [l'Armée Syrienne Libre, N.D.L.R] n’est pas reconnu en tant que tel, et bien entendu c’est un traitement au cas par cas qui doit être effectué »

Source : le " Grand Jury " RTL/LCI/Le Figaro

Au sujet de l'auteur : Nathan Weber

Journaliste