Tchétchénie : un chanteur homosexuel torturé, puis exécuté par la police

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Il était porté disparu depuis le 8 août dernier, après avoir été emporté dans une rafle policière. Selon une source proche des mouvements LGBT en Tchétchénie, le chanteur homosexuel russe Zelimkhan Bakaev est mort. Il aurait été torturé puis assassiné par les autorités tchétchènes, une dizaine d'heures seulement après son arrestation.

C'est le mardi 8 août 2017 que l'artiste, âgé de 25 ans, a été arrêté par des soldats du SOBR, une unité des forces spéciales de la police russe, spécialisée dans la lutte contre le crime organisé et les opérations militaires antiterroristes. Il s'était rendu à Grozny, capitale de la Tchétchénie, pour le mariage de sa sœur.

Ses amis, qui ont par ailleurs révélé que Zelim Bakaev avait été dernièrement «interdit» de se produire en Tchétchénie parce que « sa musique était trop différente de ce qu'on entend en Tchétchénie », ont également rapporté qu'il avait été enlevé par les forces de l'ordre « à cause de soupçons sur son homosexualité présumée ». Un témoignage secondé par Igor Kochetkov, fondateur du Russian LGBT Network, lors d'une conférence de presse lundi dernier.

Zelimkhan Bakaev / DR

Cette histoire sordide s'inscrit, malheureusement, dans la continuité logique d'une escalade de violences homophobes caractérisées, visant la communauté LGBT en Tchétchénie — une région située dans le Caucase russe, à la frontière géorgienne.

Dans cette république constitutive de la fédération de Russie, très conservatrice, l'homosexualité est aujourd'hui considérée comme une tare qu'il faut éradiquer, selon les propres mots de son président Ramzan Kadyrov. Depuis quelques mois, la communauté internationale est de plus en plus préoccupée par la situation des homosexuels dans la région, qui ne cesse de se dégrader.

 En avril dernier, le gouvernement tchétchène était accusé par le journal russe d'opposition Novaya Gazeta d'avoir instauré un climat de peur pour la communauté LGBT+ avec des rafles d'homosexuels, des persécutions systématiques, des interrogatoires violents et des exécutions sommaires, ainsi que la mise en place de véritables « camps de torture pour homosexuels ».

Le journal russe était alors le premier à tirer la sonnette d'alarme, avant que d'autres médias, dont l'AFP, ne reçoivent des témoignages similaires venant confirmer la situation préoccupante des homosexuels tchétchènes.


Le 8 août, alors que Zelimkhan Bakaev se rend à Grozny pour le mariage de sa sœur, il est arrêté quasiment dans la foulée par un escadron des forces spéciales.

Ce n'est pas la première fois que les autorités essayent de lui mettre le grappin dessus : selon le témoignage de certains proches du chanteur à Novaya Gazeta, des individus proches du gouvernement tchétchène avaient déjà cherché à le piéger en l'attirant à Grozny, notamment en se faisant passer pour les producteurs d'une émission de musique locale.

Une fois Zelimkhan Bakaev emmené de force, sa famille aurait depuis lors tenté d'avoir de ses nouvelles, sans succès. Les autorités tchétchènes ont préféré faire la sourde oreille, affirmant ne pas savoir où se trouvait le jeune homme, et suggérant qu'il aurait peut-être quitté le pays. Mais selon Newnownext, un site d'information appartenant à la chaîne LGBT Logo TV, le sort du chanteur aurait en réalité été réglé quelques heures seulement après son arrestation.

Une source anonyme, proche des activistes de la région, a révélé ce week-end au média que Zelimkhan Bakaev a succombé, après avoir été torturé à mort. « Il est arrivé à Grozny et a été arrêté dans les trois heures. Dix heures plus tard, il a été assassiné. »

Jusqu’où ira la violence d'État en Tchétchénie, et les persécutions homophobes ? Malgré les timides réactions et les condamnations internationales, les arrestations continuent à se poursuivre et à se faire de plus en plus violentes. Pour l'instant, plusieurs pays, dont la France, ont accordé l'asile politique à des homosexuels tchétchènes. En attendant, d'autres sont forcés à se marier, terrifiés d'être soupçonnés à leur tour.


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Au sujet de l'auteur : Nathan Weber

Journaliste