En début d'année, un salarié d’une entreprise de logistique dépose un arrêt maladie. Le motif : un décès familial qui l’affecte profondément. Quelques heures plus tard, son patron le croise dans un restaurant. Rien d’illégal, rien d’extraordinaire, sauf que cette sortie va être interprétée comme une faute.
L’employeur, estimant que ce comportement est incompatible avec l’arrêt de travail, n’hésite pas : licenciement pour faute grave. Le salarié est abasourdi. Pour lui, cette pause déjeuner ne remettait pas en cause son incapacité à exercer. Il cherchait seulement un peu de répit.
Une sanction ressentie comme une mauvaise entorse à la confiance
“J’étais en arrêt, mais je ne jouais pas la comédie”, explique-t-on dans son entourage. Il n’avait aucune interdiction de sortir, aucun effort intense à faire. Pourtant, ce repas est devenu symbolique d’un arrêt “trop visible”. Pour lui, l’arrêt ne signifiait pas isolement complet ; pour l’employeur, ça signifiait tromperie.
La sanction a frappé doublement : la maladie et maintenant la mise en doute. Le salarié se sent à la fois vulnérable et accusé. Un sentiment que beaucoup reconnaîtront : celui d’être jugé pour avoir “fait un pas de travers” alors que l’on avance à tâtons.
Devant les juges, la réalité retrouve ses couleurs
Après plusieurs mois, le dossier passe devant la commission compétente, celle qui examine les licenciements abusifs. Le récit est entendu : l’arrêt est validé, l’état de santé expliqué, le repas replacé dans son contexte. Et très clairement, la sanction ne passe pas. Les juges ne voient pas d’incompatibilité entre un arrêt maladie et un déjeuner au restaurant, tant que celui-ci ne sabote pas la guérison.
Le verdict tombe : licenciement abusif. L’employeur devra réintégrer le salarié, et l’indemnisation est prévue (environ 19 000 €). Pour lui, ce n’est pas seulement une sortie de crise administrative : c’est l’affirmation qu’il n’a pas “soufflé pour tricher”, qu’il n’a pas été en congé “de luxe”, mais en arrêt, tout simplement.
Une affaire qui questionne nos préjugés sur l’arrêt maladie
Au-delà de ce cas précis, cette affaire va plus loin. Elle interroge nos réflexes collectifs : penser qu’un arrêt maladie implique automatiquement un isolement, une immobilisation stricte. Or la réalité est différente. L’arrêt peut être physique, psychique, émotionnel. Parfois, sortir, changer d’air, parler ou juste manger avec quelqu’un : ça aide à aller mieux.
Et puis, elle rappelle une évidence : la confiance reste un pilier. Un salarié mérite d’être accueilli avec nuance, pas immédiatement sur la défensive. Cette décision annonce un message simple : on n’est pas “à l’arrêt” dans une boîte de psychologues, on est un humain qui traverse une épreuve. Le droit du travail le reconnaît.
